Une nouvelle jeunesse

Alors que son nouveau corps avait sombré dans l’inconscience, l’âme de Gohen s’était elle illuminée, comme si une partie de ses interrogations et causes de trouble s’étaient envolées. Changer de corps lui prodiguer à chaque fois cette sorte de baume au cœur et sans qu’il le sache, un sourire apaisé s’était dessiné sur les lèvres de son jeune visage. Pourtant, en plus de cette paix relative, quelque chose était vraiment différent cette fois. Il se concentra intérieurement en plongea encore plus profondément dans les bas-fonds de son âme.

Ce qu’il y entrevit l’effraya quelque peu. Il semblait qu’en intégrant ce nouveau corps, le maître démon ait approché son âme trop près de celle qui était déjà présent dans ce jeune être de chair et qu’elles aient en quelque sorte . . . Fusionné ? Cela n’était jamais arrivé à Gohen qui arrivait toujours parfaitement à incorporer son âme à un nouvel hôte sans ce genre de problèmes. Quelles allaient être les répercussions sur le contrôle qu’exercerait le démon sur son nouveau corps ? Il se posait d’innombrables questions mais n’eut pas le temps d’y réfléchir car le doux son d’une voix le tira de son inconscience.

Le gamin ouvrit ses yeux d’un bleu aussi clair que le ciel et sembla désorienter. Il balaya de son regard les murs qui l’entouraient et le plafond qui se trouvait au dessus de lui. Puis, ses yeux se posèrent sur Enki et, dans un premier temps, il ne sembla pas le reconnaître. Mais une voix à l’intérieur de lui souffla que c’était tout à fait le cas et un sourire rassuré se dessina sur ses lèvres. Et alors, d’une voix qui rompait totalement avec l’ancienne voix profonde et grave de Gohen, il articula :

- En . . . ki . . . fit-il faiblement. Puis, ses yeux s’ouvrirent en grand et il se jeta sur lui, accrochant ses bras autour du cou de son serviteur. CHOUUUUUU !!

En fait, Gohen avait très certainement dû se méprendre sur l’âge de son nouvel hôte. Ce n’était pas une vingtaine d’années humaines qu’il devait avoir mais bien trois ou quatre ans de moins. Pas le passé, jamais le démon n’aurait agi de la sorte, même s’il considérait déjà depuis longtemps Enki comme son seul ami, même s’il ne le lui avait jamais vraiment dit.

Gohen qui avait son visage niché dans le cou de l’autre démon défit son étreinte et regarda Enki avait un sourire radieux. Apparemment, le caractère du jeune homme avait une place bien plus importante que celui de Gohen lorsque leurs deux âmes étaient entrées en contact. Ses yeux intensément bleus se plantèrent dans ceux de Enki et il lui demanda sur un air enjoué :

- Tu es venu parce que tu pensais que j’étais en danger ?

Le gamin, toujours pendu au cou d’Enki, se surpris à se dire que c’était bien la première fois qu’il voyait le démon d’aussi près. Il pouvait voir chaque traits de son visage et se rendit compte pour la première fois que sa peau était parfaitement lisse, chose très rare chez ceux de leur race. Gohen, en remarquant cela, ne put qu’élargir le sourire qu’il affichait face à Enki.

Alors, il vit les joues du démon rougir sans qu’il ne comprenne pourquoi il pouvait bien avoir un tellement comportement. Était-ce parce que Gohen lui était sauter au cou aussi soudainement et qu’il ne s’y attendait pas ou bien était-ce le geste en lui-même qui le dérangeait ? Le jeune cerveau du gamin se mit à tourner aussi rapidement qu’il le put mais son immaturité soudaine lui empêcher de trouver la réponse à sa question. Et alors, au lieu d’avoir honte face à Enki à cause de son ignorance, Gohen préféra répondre à la première question de son plus fidèle ami et serviteur.

- Bien sûr que c’est moi Enki ! Qui voudrais-tu que ce soit d’autre ? Lui demanda-t-il avec une innocence toute naturelle. C’est juste que je ne fronce plus les sourcils tout le temps. Tu sais que c’est difficile et que ça fait mal aux yeux ! Et puis parler comme ça, fit-il en prenant la voix la plus grave dont il était capable et en fronçant les sourcils en prime, ça fait mal à la gorge aussi !

Et alors, les traits du gamin aux yeux de saphir se détendirent à nouveau et il se mit à sourire de toutes ses dents à nouveau. Il savait très bien que le démon allait lui poser d’autres questions alors, de toutes ses forces, Gohen se retint de se remettre à parler et attendit patiemment qu’Enki lui fasse part de ses interrogations. Le gamin n’eut pas bien longtemps à attendre avant qu’elles arrivent. Alors, Gohen mit les mains sur les hanches en faisant semblant de faire la moue :

- Et bien, j’ai tout simplement changé de corps voyons ! Qu’imagines-tu ? Lança-t-il à Enki avec un air de défi avant d’éclater d’un rire franc. Je crois que je me suis approché trop près de l’esprit présent dans le corps de ce jeune homme mais ça fait rien, hein Enki-chou ?

Les yeux de Gohen devinrent suppliant à l’image de ceux d’un chat car il espérait de tout son être que son ami ne le rejetterait pas à cause de son nouveau corps, de son nouveau comportement. Alors, à l’idée qu’Enki ne le laisse seul dans ces murs qui tombaient en ruines, les yeux du gamin s’embuèrent de larmes et à nouveau, Gohen logea sa tête dans le cou d’Enki en se retenant d’éclater en sanglots.

L’ancien maître des démons était par le passé un être mystérieux mais la nouvelle énigme qu’il semblait représenté, bien que tout à fait différente, avait l’air d’être bien plus compliqué.

Alors que la tristesse montait en lui, le garçon aux yeux de saphir avait sentit les mains d’Enki se plaquer dans son dos en lui affirmant que son soudain changement d’apparence n’avait pas d’importance. Toute trace de tristesse disparue alors immédiatement de son esprit et la gaité qui l’habitait encore quelques instants auparavant reprit place en lui. Enki enchaîna en soulignant que ça faisait longtemps qu’ils ne s’étaient pas vus. Tout en donnant de petites tapes amicales sur les deux épaules, Gohen lui répondit :

- Oui ! Trop longtemps Enki, tu me manquais ! Et puis je voyais plus personne en plus. Et puis les gens me regardaient toujours bizarre. Et puis à chaque fois il y avait des grands méchants !

Et alors, le garçon se mit à débiter à une vitesse impressionnante le récit de ses dernières aventures, parlant de la destruction d’une partie de Satan City par un monstre bleu et les guerriers qui lui faisaient face, en particulier un homme-requin, mais également le court affrontement avec ce dernier dans la salle de l’esprit et du temps. Enfin, il raconta sa défaite face à Majin Végéta lors du tournoi et enfin son arrivée ici pour changer de corps. Enki n’avait certainement saisi que la moitié des informations que Gohen avait voulu lui donner à cause de la vitesse à laquelle il avait parlé. Enfin, le garçon se tut et prit une profonde et bruyante respiration. Enki sembla profiter de se répit pour poser une nouvelle question à l’enfant concernant la raison qui l’avait poussé à changer de corps. Gohen baissa la tête et poussa un profond soupir. Lorsqu’il releva les yeux vers son serviteur, l’éclat dans ses yeux bleus étaient différent, comme si toute la maturité et la grandeur du démon étaient soudainement revenues. Lorsqu’il ouvrit les lèvres pour répondre, c’est une voix plus profonde qui en sortit :

- Il n’est nullement question d’une gêne. Certes mon ancien corps commençait à essuyer la morsure du temps et perdait en force mais . . . Je pense qu’inconsciemment, je cherchais à fuir cette douleur qui m’étreignait depuis trop longtemps. Est-ce une faute de ma part ?

Puis, l’éclat disparut du regard du gamin qui ne reprit pas pour autant la parole. Ses yeux bleus restèrent planter dans ceux d’Enki et son cœur de jeune garçon fut à nouveau troubler. Mais la proposition du démon eut rapidement raison de sa mélancolie et son magnifique sourire aussi pur qu’innocent réapparut son visage à nouveau radieux.

- Oui !! En route pour la maison de papa Enki !

Et dans un saut élégant et ample, Gohen atterrit en position assise sur les épaules de son ami. Il tendit la main vers le mur qui se trouvait à deux mètres d’eux et un incroyable rayon faisant deux fois sa taille s’échappa de sa main, détruisant tous les murs de pierres sur son chemin. Lorsque le rayon disparut, il ne restait plus qu’une ligne droite vers l’extérieur que l’on pouvait apercevoir. En pointant du doigt la lumière qui passait par la large brèche qu’il venait de créer, Gohen s’écria :

- Par ici la sortie !