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 Une légère attente

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Baron Mars Babel
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Démon
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MessageSujet: Une légère attente   Une légère attente ClockDim 27 Déc 2020 - 21:54
”RRRGH ?!”

”Mmmh ? Oh, ma foi, ça s’est pas si bien passé que ça. Je me suis fait un peu ignorer. C’est pas grave, ça fait partie du jeu !”

Le mur de singes géants avait de nouveau entamé son chemin, avançant tranquillement
contre l’horizon, effaçant de leurs ventres pachydermiques tout rayon du soleil. Comme des héros éclairés par la lumière divine, ils s’étaient éloignés du chaotique ring de combat, tournant le dos aux constantes explosions. Les macaques tenaient leurs lunes artificielles contre leurs torses, maintenant leur surpuissante forme sauvage et poilue malgré l’heure de la journée.

”En toute honnêteté, je ne fais que suivre mon instinct. Je poursuis l’amusement. Cette planète sera recouverte de macaques dans le temps voulu, mais le chemin qui mène à ce but est trouble. Incertain. Il vaut mieux observer partout. Mithra a déjà des graines de désarroi dans la tête. Je n’ai eu qu’à lever les épaules avant de tourner silencieusement les talons. Elle a un petit moment à passer avec une fille que… j’ai déjà vu auparavant.”

”MRRRIGHUS ?”

”Non, non, je suis sûr de l’avoir vu quelque part. Elle fait partie de la génération actuelle. Tu sais très bien, Ticho, que je n’ai aucune raison de trop m'éduquer au sujet de ceux ou celles qui s’occupent de qui ou de quoi à tel ou tel moment. Je suis à peu près certain qu’en ce moment ils appellent leurs nettoyeurs de planètes inutiles “dieux de la destruction”. Mais pas complètement. Imaginons… soixante pourcent ? Soixante-dix ? Mais c’est pas une nettoyeuse, elle...”

Il se gratta le menton un instant, illuminant la nuit tombant de la clarté de son sourire et de ses yeux perpétuellement écarquillés. Soudainement, il claqua des doigts, un bruit qui résonna dans tout le désert.

”Towa ! Une méchante magicienne bleue avec du violet à lèvre et qui porte une tenue serrée en latex ! Ou bien je me trompe de cycle. Peut-être que c’était avant, Towa ? Mmh… C’est compliqué de se rappeler. Peut-être qu’il faudrait que je me renseigne, à nouveau...”

”ROOOOOOH !...”

”Oui, c’est aussi barbant que ça en a l’air. Mes frères et soeur n’en ont pas plus à faire que moi. Dès que le système fonctionne correctement, tu n’as plus la motivation de rester renseigné. Tu veux juste profiter de ta création. C’est le cas pour nous. Comment les mortels nomment-ils cette perception du monde… Une sandebauxe ? Sandbox ? Je crois que c’est ça.”

La main robuste du plus grand des gorilles se tint ouverte au niveau de son front : une paume de gigantopithèque fit ascenseur pour sa majesté du changement, de la destiné et du libre-arbitre. Ses bottes firent don d’atterrissage entre les rides, avant de bénir le lieu d’arrivée : le château royal. Avançant vers l’intérieur, ce qui restait de gardes s’agenouillait face à son passage tandis que les fenêtres s’ouvraient mystérieusement pour lui permettre de continuer sa conversation.

”Une fois que “Towa” aura fini de jouer avec sa nouvelle friandise, je l’attendrais ici. Et je sais pas ce que j’en ferais, peut-être que je lui donnerais une quête à faire, peut-être que je l’annihilerais. Mais ce serait dommage, non ? Créer une nouvelle ère pour les Saiyen, sans un Saiyan à leurs têtes ? Ce serait comme voir un démon diriger des terriens ! Il faudrait un visage qui ne soit pas le mien. Faisons de Mithra une folle reine qui néanmoins entama un pas dans la bonne direction. Ça vous botte ?”

”RAH !” “GRR !” “FOOOH !” “BARF !”

Il écouta les avis de ses macaques gigantesques, avant de se tourner vers les Elyséens qui traînaient dans les environs.

”Vous, surtout, évitez de dire que je suis là, hein ? J’aimerais faire une surprise. Faites comme si de rien n’était.”

La garde du château acquiesça avant de se relever et de patrouiller comme s’il n’y avait pas une multitude de gorilles qui regardait le hall royal depuis les fenêtres.

”Donc, voilà mon plan : Je vais aller me restaurer auprès des cuisiniers royaux. Pendant ce temps, vous, amusez vous dans le jardin, derrière le château. J’ai vu une grande étendue verte. Évitez de montrer vos lunes à tout le monde. Quand notre Mithra à l’esprit tordu reviendra, on la poussera dans notre direction. Pas la peine d’être impatients.”

Il s’asseya un instant sur le trône royal.

”Terriblement inconfortable. Je préférerais m'asseoir sur des cailloux.”
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MessageSujet: Re: Une légère attente   Une légère attente ClockSam 9 Jan 2021 - 19:12

UNE LÉGÈRE ATTENTE


Ils avaient annoncé des orages pour la fin de la journée, mais je ne m'attendais pas à ce que le ciel ait une couleur aussi cramoisie. Je suis allé jeter un oeil dehors pour vérifier que je n'avais pas confondu ça avec le passage d'une bannière de publicité juste devant l'entrée de l'atelier, mais j'ai dû aussitôt accepter que je n'étais pas entrain de me faire des idées. Je suis sorti lentement mais surement sur le pas de la porte, armé de la tasse de café encore chaude que je venais de récupérer du percolateur, et je suis resté quelques instants avec un air ébahi.

Et puis quoi encore ? j'ai murmuré, abasourdi.

Peut-être un peu trop fort, parce que j'ai entendu l'intonation de ma voix se répercuter encore et encore dans la salle immense dans laquelle je venais d'entrer. Oui, parfois ça m'arrive de mettre les pattes à des endroits où il ne faudrait pas mais là j'avais comme l'impression que c'était cet endroit qui venait de s'incruster dans ma vie confortable et paisible sans trop demander mon avis. Ne vous méprenez pas : j'aime m'aventurer dans des contrées inconnues et je n'hésite jamais à prendre tout ce que la vie me donne. Mais j'aime tout autant quand je suis un minimum préparé à me prendre un aller simple vers une dimension parallèle sans même avoir pris mon billet.

Puisqu'il ne me restait plus qu'à me prendre au jeu de mon imaginaire, j'y suis allé sans me poser plus de questions. Pendant un premier temps je me suis demandé si j'étais bien réveillé, mais l'individu démesurément grand qui était assis sur le trône à cinq mètres de moi avait l'air tout sauf le fruit de mon imagination. Si ça se trouve, il devait penser que j'étais le fruit de son imagination. Une invention de l'esprit parmi tant d'autres, à peine remarquable si l'on décide de ne pas trop y prêter attention. Mais ne vous en faites pas pour moi : ça arrive plus souvent que ça en à l'air.

Pardonnez mon intrusion, ô noble souverain, l'ai-je accosté pour ne pas lui faire perdre de son précieux temps.

J'avais fait irruption dans son domaine sans même m'annoncer ni lui apporter un quelconque présent pour honorer sa magnificence. Il m'avait l'air assez menaçant mais si je me montrais poli et respectueux, je devrais m'en tirer à bon compte.

Si tout se passe bien.

Il se trouve que mes envies de découverte aient fait en sorte que la porte de mon imaginaire se soit, euh, ouverte sur vos quartiers.

Son visage était un peu difficile à voir, mais dès le moment où il se montra un peu plus ostensiblement, son apparence me heurta comme un poing en plein milieu de la figure. Ou plutôt, comme un doigt plein d'encre sur les pages de mon encyclopaedia la plus vénérable.

Oh ! Le Baron Mars Geoffrey Hinnbinn Tiamat Tzeentch Babel ! L'archidémon de la Tour ! Le Destructeur de la Première Langue, le Premier Antagoniste, le... Ah mince, ma mémoire me joue des tours au plus mauvais moment. Enfin bref : si je suis en présence d'une entité aussi primordiale que maléfique, c'est qu'il doit bien y avoir une raison. Seul un adapte des forces occultes tel que lui peut m'avoir invoqué en ces lieux : je ne suis qu'un simple mortel, après tout. Ma seule magie est celle de mon encre et de mes pinceaux sur une toile de coton ou des mots en farandole sur ma vieille machine à écrire, mais passons.

J'ai posé mon regard sur ma tasse de café puis sur mes mains tremblantes. Un silence inconfortable s'était abattu sur la salle, comme l'absence de réponse à une lettre postée il y a trois mois.

Je peux vous amener un café ? Un thé ? je lui ai proposé, ne sachant pas trop pas où continuer.

Quelque part dans l'atelier, il devrait bien y avoir une merveille qui puisse satisfaire ses attentes, n'est-ce pas ?


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MessageSujet: Re: Une légère attente   Une légère attente ClockDim 10 Jan 2021 - 3:49
Il semblerait que je me sois trompé : “Un instant” était une période trop courte pour efficacement décrire le temps passé sur le trône. Nous pouvons à présent affirmer que les âmes dans son manteau avaient profité d’un temps de repos suffisant sur l’or qui composait cette chaise d’honneur et d’enjeux politiques. Désagréablement inconfortable, il fut néanmoins béni par l’obélisque présence de sa Majesté de la tour ! La chronologie vit ce fantastique évènement pour le trône des singes rester inférieur à une minute. Mais alors qu’il se levait, un nouvel individu fit place dans le hall royal. Rude et grossier comme tout mortel un peu spécial entrant dans la présence de son supérieur, il ne se prosternait même pas. Dans les yeux de jade du Baron un reflet se créa : un visage noir comme l’encre, des cheveux blancs comme la neige, et des oreilles animalièr -

”Non.”

Je -

”Tu n’as pas lu sa fiche. Son apparence est différente du dessin en haut à gauche. Crétin.”

Mais -

”Reviens quand tu auras obtenu les informations nécessaires. Je peux tolérer un narrateur lèche-cul mais pas un incompétent.”

T-très bien, Baron…





...

Je ne suis pas un maître des lettres mais j’imagine que quelqu’un devra décrire mes actes en attendant. Je suppose qu’en face d’un point de vue à la première personne se doit d’apparaître un autre. Mais c’est fatiguant d’être le protagoniste, de devoir agir et réfléchir en plus à comment je formule chacune de mes actions. Il me tarde de redevenir semi-inconscient. Voir à la place de mes mains leurs descriptions est si troublant. C’est comme la littérature érotique : malgré les détails, malgré les formulations, notre lit garde ses dimensions accomodées à une personne. Je vous souhaite de ne jamais devoir vous installer sur cet interstice dégueulasse qu’est celui de narrateur en temps réel. Les choses vous arrivent et ne vous arrivent pas en même temps. Parler est amusant. Parler tout seul en voyant ce qui se passe l’est beaucoup moins. Si vous vous arrêtez de parler tout seul, plus rien ne se passe. J’espère voir cet imbécile de retour au plus vite.

L’individu en face de moi m’avait qualifié de "démesurément grand”. Cela m’invita à penser que je le surplombais de l’humble mètre soixante-quinze que je m’étais attribué. Je faisais donc face à un homme maudit par son adolescence, ne le laissant pas dépasser… disons… le mètre soixante. À moins que “démesurément grand” ne soit rien d’autre qu’une métaphore avec la prestance que les mortels m’accordaient. Je fais face à mon égal ou bien à un grand nain, en même temps. Une description de Schrodinger, en quelque sorte. Cela ne me plait pas. Il me tarde de redevenir un personnage.

Je ne suis pas nécessairement un archidémon de la colère. J’ai quelques frères qui sont davantage liés à cette émotions… à moins qu’ils soient des sœurs durant ce cycle ? Peut-être ont-ils trouvé un entre-deux sur une planète encore plus ouverte que celle-ci ? Un entre-trois ? Un entre-quatre ? Je ne peux les juger s’ils-elles désirent se faire des seins durant ce tournant… je m’égare ! Je ne suis donc pas donc pas un archidémon de la colère. Mais j’espère que je n’eus pas trop l’air frustré. Peut-être que mon sourire s’est légèrement estompé pour faire face à un rictus forcé ? Cette situation me déplaisait. Lui, il restait poli.

Il parla d’une porte de son imaginaire. J’aimais cette idée. Les mortels n’avaient pour eux que leurs esprits. Celui-ci allait avec son désir de créer. Il avançait de la seule force de sa créativité. Je ne suis pas le mécène de ce genre d’individus, mais j’en reste un avide amateur. Je ne suis pas l’Archidémon de leurs réflexions internes ni celui de leurs méandres dans l’obscurité de leurs imaginations, je ne suis que la perturbation qui les pousse à créer ou à partager.

Par son refus du silence, il me rappela que je devais moi-même agir. Je ne pouvais plus réfléchir en paix quand la moitié de mon temps était passé à aligner mes pensées en lettres puis mots.


”Tu as l’air nerveux, pourquoi ça ?...”

Je décidai que ma prochaine action fut de me lever. Je voyais mes jambes se redresser. Je n’étais plus assis. Je m'approchai. Je souriais. Toutes ces descriptions semblent si redondantes.

”Tu me connais, n’est-ce pas ? Pas personnellement, bien sûr, sinon tu aurais un bagage émotionnel troublant te conduisant à une réaction bien plus grave que de simples tremblotements. Mais je ne te connais pas - Enfin, je suis supposé ne pas te connaître. Qui es-tu donc, que je remplisse un trou dans ma perception des choses ?”

Il me fallait continuer à être en mouvement. Rester un être vivant agissant en même temps qu’il parlait. Ainsi j’arrivais en face de lui, qu’importe s’il était moyen ou petit. J'espère qu’il me répondit et qu’il m’expliqua sa profession. Bien sûr, je savais déjà deux-trois petites choses. Ainsi je peux déjà affirmer poser cette première question. Maintenir la chronologie était difficile dans mon état actuel. J’espère sincèrement ne pas paraître prétentieux. Mon sourire était poli face à lui. Ma narration est probablement comparable à celle du premier demi-dieu hautain voyant apparaître un mur devant lui.

”Je suis dans une situation qui s’approche du mélange entre la rêvasserie inattendue et l’ennui face au travail. Bien sûr, j’espère ne pas avoir à t’en expliquer les enjeux. Cependant, si tu peux te procurer ce qui m’est nécessaire, tu pourras anéantir cette fatigue.”

Je claquais des doigts avec l’idée qu’un disciple hypnotisé par ma présence apporte une chaise confortable, avec l’idée de m’asseoir dessus, laissant le trône dur à mon invité. Mais beaucoup de mortels préféraient l’honneur à un coussin.

”Raconte-moi une histoire.”
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MessageSujet: Re: Une légère attente   Une légère attente ClockLun 11 Jan 2021 - 14:15

UNE LÉGÈRE ATTENTE


J’ai respiré une seconde, jusqu’au moment où j’ai posé le regard devant moi et alors j’ai fait un bond. Il s’était déplacé sans un bruit et maintenant que je l’avais en face de moi, j'ai constaté qu'il n'était pas aussi grand qu'il en avait l'air. C'est peut-être moi qui me suis senti tout petit devant la grandeur de sa prestance. De plus, je n’arrivais pas vraiment à imaginer ce qu’il pouvait bien penser de moi. Il me mettait mal à l’aise.
 
— Tu as l’air nerveux, pourquoi ça ?...

Mes oreilles se s’étaient redressées d'un coup à son approche. On aurait presque pu croire qu'elles n'existaient pas. J’imagine que c’est le désavantage d’avoir une particularité physique sortant de la norme. Peut-être de là d’où vous venez. Pas tant de là d’où je viens.
 
— Tu me connais, n’est-ce pas ? m’a-t-il demandé, la blancheur de ses dents aussi pure que du marbre. Pas personnellement, bien sûr, sinon tu aurais un bagage émotionnel troublant te conduisant à une réaction bien plus grave que de simples tremblotements.
 
Il y avait une couleur dans sa voix derrière laquelle je n'aurais pas su mettre une émotion en particulier, mais son intonation était curieusement indulgente et il ne m'a pas fallu plus pour que je puisse me détendre. A mon grand soulagement, il semblerait que je sois destiné à avoir la vie sauve… en tout cas pour aujourd’hui.
 
— Mais je ne te connais pas — Enfin, je suis supposé ne pas te connaître. Qui es-tu donc, que je remplisse un trou dans ma perception des choses ?
 
Je n’ai pas voulu trop en faire alors je me suis présenté le plus modestement possible sans pour autant omettre la vérité sur mon vécu.
 
Je suis Echo Faraday, calligraphe de ma profession et observateur quantique de ma situation. C’est un honneur de faire votre connaissance, Monsieur le Baron.
 
En voilà, une rime fort amusante.
 
Je me suis incliné pour faire bonne mesure. Le silence s’était encore installé sans demander notre avis alors mes mots se sont à nouveau pressés hors de ma bouche.
 
Comme vous avez pu le voir je viens d’ailleurs, mais je n’avais pas l’intention de vous déranger. J’ai entendu parler de votre personne dans un très vieil ouvrage que j’ai rangé dans ma librairie personnelle et que j’ai consulté il y a fort longtemps. J’espère que vous ne m’en tiendrez pas trop rigueur !
 
Je l’espère également.
 
Ses pupilles d’émeraude ont continué de m’observer, puis il a repris la parole d’un ton las :
 
— Je suis dans une situation qui s’approche du mélange entre la rêvasserie inattendue et l’ennui face au travail. Bien sûr, j’espère ne pas avoir à t’en expliquer les enjeux. Cependant, si tu peux te procurer ce qui m’est nécessaire, tu pourras anéantir cette fatigue.

Aussitôt il claque des doigts mais je compris dans la foulée que ça ne m’était pas adressé, puisqu’un laquais se manifesta pour lui offrir une assise apparemment plus confortable que le trône sur lequel il s’était posé jusqu’alors. Bon, il ne m’avait visiblement pas fait apparaitre de nulle part pour faire de moi son serviteur. Mais pourquoi faire, alors… ?
 
De quoi avez-vous besoin, cher Baron ?

— Raconte-moi une histoire.
 
Oh. Alors ça je ne m’y attendais vraiment pas. Je l'ai regardé d'un air hébété pendant une demi-seconde avant de me reprendre afin de ne pas trop passer pour un ahuri. Même une entité aussi primordiale que lui ayant vécu durant des millénaires et des millénaires n’était pas visiblement pas épargnée par un phénomène aussi mortel que l’ennui. Une profonde compassion pour son cas étreignit mon cœur. Mes doigts étreignirent à leur tour la tasse de café que je tenais. Elle était presque tiède.
 
Je possède bien des histoires à vous raconter, mais je ne peux promettre qu’elles puissent vous passionner au point de faire disparaitre votre lassitude, j'ai admis un peu timidement.
 
J’étais pas en position de lui refuser quoi que ce soit de toute façon.
 
L’une d’entre elles est une légende qui est plutôt populaire là d’où je viens. On la raconte sous forme de comptine ou de prophétie, mais elle n’a jamais cessé d’inspirer les personnes qui la perpétuent.
 
Je ne sais pas si je saurais m’en souvenir par cœur, mais ça valait le coup d’essayer.
 
Je pense qu’elle pourrait vous plaire. Oh, mais vous l’apprécierez peut-être mieux autour d’un en-cas, faites-moi confiance !
 
Autant installer confortablement ses lecteurs avant de commencer l’immersion dans un récit, ne pensez-vous pas ?
 
Je me suis dérobé à sa vue puis je suis revenu en moins de temps qu’il n’a fallu pour le dire, comme je m’en doutais j’avais laissé de quoi faire des collations sur le comptoir et c’était la moindre des choses de les mettre à sa disposition... à défaut d’être venu à lui avec des offrandes entre les mains.
 
Servez-vous, je vous en prie !
 


La Noirceur d’une Nuit sans Lune :
L’amertume de ce café pourrait aller de paire avec l’estime de soi la plus sombre.
 
L’Eté des Amants :
Thé noir, pomme, amande, cannelle, vanille, une pointe de gingembre, beaucoup de calme et de volupté.
 
Souvenir d’Enfance :
Avez-vous déjà essayé de mettre du sirop à la menthe dans votre lait ?
 
Trois Semaines :
Ces biscuits secs ont l’air bien appétissants, mais il pourrait y avoir du poivre dedans pour ce qu’on en sait.
 
Un Après-midi de Pluie :
L’humidité d’une averse, la chaleur d’une maison, la bonne odeur de la fleur d’oranger dans la pâte à crêpes…


 

Le poids de l’attente a envoyé un frisson d’appréhension dans mes épaules mais je ne me suis pas laissé démonter : j’en ai profité pour questionner ma mémoire et me préparer à réciter ce que je savais. Si cela ne lui plaisait pas, au pire, j’avais encore quelques contes à lui faire part. Je ne voulais surtout pas paraitre prétentieux. J’ai donc poliment attendu qu’il soit disposé à m’écouter mais surtout qu’il me donne l’autorisation de poursuivre : y’avait un je-ne-sais-quoi de très imposant dans son aura et vous comprendrez bien que je n’avais surtout pas envie de le contrarier.
 
Prenez tous le temps qu’il vous faut : l’éternité nous appartient.




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MessageSujet: Re: Une légère attente   Une légère attente ClockLun 11 Jan 2021 - 21:54








Ah, oui. Il n’est toujours pas de retour. J’étais occupé à observer cet individu reprendre une taille normale. C’est une possibilité d’apparence de moins. Maintenant, le plus troublant finissait par être la mention de ses oreilles agitées. Je n’en connais que très peu qui se redressent chez un humain troublé. Faisaient-elles liaison entre son cou et sa mâchoire ? Étaient-elles alignées en diagonales avec ses yeux et son nez ? Si c’était le cas, à quoi ressemblait son crâne ? Avait-il deux trous juste à côté de son cerveau ? J’espère que je n’ai pas l’air de meubler. Car c’est précisément ce que je fais.

Echo Faraday. Il devait probablement y avoir une certaine onomastique dans cette appellation. Malheureusement, j’ai déjà oublié où j’avais entendu le nom et je n’avais pas grand intérêt à réfléchir à ce prénom. D’autant que je me souvienne, l’oréade qui avait tenté de se faire tirer les cheveux par Narcisse était une femme. Je ne juge pas par les apparences, mais ce personnage ne s’était pas qualifié “d’observatrice quantique”. Je pouvais déduire que c’était un homme. C’était un honneur de faire ma connaissance, selon lui. Je l’espérais bien. Les dialogues sans respect l’un pour l’autre n’allaient généralement pas très loin.


”Tout le plaisir est pour moi, Monsieur Faraday.”

M-me revoilà, ô mon Baron !

”Mmh ? Ah ! Enfin ! Ne te laisse plus distraire, abruti. Entame immédiatement ton récit !”

T-très bien, Baron… Euh… Oui, cet intru à l’apparence encore trouble était en train de révéler d’où il tenait sa connaissance de l’archidémon. Son auguste présence était intimidante pour ce pitoyable mortel qui tentait de troubler le silence quand ce dernier lui rappelait sa faiblesse. Le dialogue qui suivit, vous l’avez déjà lu. Les illustres demandes de l’être supérieur qui avait cessé d’inonder l’or de sa présence pour s'asseoir sur une chaise bien plus confortable. Cet Echo se sentait bousculé d’entendre une telle demande de la part du dieu qui changeait de chaise en face de lui. Qu’est-ce qu’un moucheron penserait si un homme prenait sa taille avant de lui demander de vibrer ses ailes dans un bourdonnement apaisant ?

”Une légende, hein ?”

Cet idiot venait de fausser compagnie au Baron ! Ne serait-ce que l’espace d’un instant, mais tout de même ! Ainsi disparaître pour aller chercher de quoi manger ? Était-il du genre à manger du pop-corn dans le cinéma, à ne pas pouvoir se séparer de sa nourriture durant l’exposition à l’art et à la fiction ? Dévorait-il sa légende comme un chien galeux ? Quelle inspiration ! Et il osait présenter ses collations avec des noms poétiques à l’eau de rose ? Mais dans son infinie miséricorde, le Baron n’en eût rien à faire. Ses dents alignées comme des balles d’argent, il observa cette offrande en se caressant le menton.

”Je vais commencer par le café, je pense.”

Il assuma que son choix était déjà prêt à être consommé et ainsi il le fut. Son divin et omnipotent index s’enlaça autour de l’anse, portant le liquide noir aux contours de sa bouche. Il accepta trois gorgées de cette misérable offrande. Les deux étoiles de jade se recouvrirent très légèrement d’obscurité dans un instant de lassitude mélancolique.

”Ça a le goût de déception. Des efforts soudainement mis à néant. Vingt ans à éduquer un gosse et il finit par devenir mime. Pas mal du tout !”

Dans la chaise plus confortable que ses sycophantes lui avaient apporté, il enfonça ses omoplates.

”Tu avais dit avoir entendu parler de moi grâce à un vieil ouvrage. Je ne savais pas qu’on pouvait entendre un livre.”

Ah, une très astucieuse observation ! Quelle incroyable rhétorique ! Prouver ainsi à un mortel son erreur était -

”Je taquine, je taquine. Ce qui m’intéresse c’est davantage la version de moi dont tu as entendu parler. Avais-je l’apparence que je tiens en ce moment ? Faisais-je plus grand ? Plus petit ? Etait-ce une apparition médiévale, où je me dévoilais en femme nue flottant en dehors d’un lac, donnant une épée légendaire à un tocard pour ruiner un royaume paisible mais autoritaire ? Peut-être que j’étais une bête enragée, volant de planète en planète afin d’annihiler de mon crachat enflammé la capitale d’un empire spatial ? Ou bien est-ce que j’étais un simple chien, venu détruire la tranquillité familiale en transmettant d’une morsure la rage à un aîné ?”

Il continua son café alors.

”Je demande, car je change à chaque cycle. Mes frères et sœurs Archidémons le font de même. Durant le dernier cycle… J’étaaaaaais… ah ! Je ne m’en souviens pas… Ça va me revenir, à un moment.”

Ce qui se présenta ensuite à Echo fut un moment pour répondre, parler de sa source de connaissance. Il avait droit à une incroyable période indéfinie pour tout dire, durée durant laquelle le Baron termina son café amer et maussade. Il y eut ensuite le temps pour que le Baron puisse lui-même répondre. On ne pouvait encore affirmer ce qu’elle serait. Sur ce, il entama une autre discussion :

”J’espère que cette légende que tu vas me raconter n’est aucunement lié à quelque chose que j’aurais fait. Le problème avec l’éternité, c’est d’attendre du nouveau avant de se retrouver nez-à-nez avec une conséquence d’un précédent acte. Quand bien même on se lave la mémoire pour éviter de devenir de simples mortels blasés, un conte suffit à réveiller des souvenirs. Tu ne saurais le nombre de fois où un héros se dresse pour faire face au chaos que je déchaîne, invoquant une lignée divine et ancestrale, et où je m’excite avant de me rendre compte que… ‘Sacrebleu, j’ai baisé son ancêtre’.”

Il ricana, cimetière luisant d’incisives et de canines reflétant le visage d’Echo à son interlocuteur.

”Bref. Commence.”
Echo
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MessageSujet: Re: Une légère attente   Une légère attente ClockMar 12 Jan 2021 - 14:50

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— Je vais commencer par le café, je pense, s’est-il décidé après avoir brèvement pris connaissance de ma modeste collection d’en-cas.

A sa place j’aurai pas su réagir autrement, il fallait dire que ce n’était tout à fait pas grand-chose et qu’un assortiment plus large aurait été davantage à sa convenance. Mais je faisais avec ce que j’avais sous la main et c’était déjà pas mal. Disons que je n’avais pas prévu d’être invoqué par un archidémon aussi tôt en ce début de journée.

Le breuvage amer s’écoula dans sa gorge, et l’appréhension s’écoula de même au centre de ma poitrine. J’ai senti de la sueur couler dans mon dos, mais ce n’était probablement qu’une impression lointaine.

— Ça a le goût de déception, a-t-il fini par déclarer. Des efforts soudainement mis à néant. Vingt ans à éduquer un gosse et il finit par devenir mime. Pas mal du tout !

Je n’ai pas su dire s’il se montrait satisfait ou condescendant, mais il était certain que son observation s’apparentait a un genre de compliment alors je l’ai pris comme tel.

— Je suis ravi que cette modeste offrande soit à votre goût, monsieur le Baron !

Je me suis installé à côté de lui, j’ai arrangé les pans de ma veste et je l’ai laissé disposer de la tasse de café comme bon lui semblait. J’ai espéré qu’il ne continue pas à déceler la nervosité dans mes gestes mais je me suis aussitôt senti idiot, qui étais-je pour penser pouvoir tromper les sens d’une entité venue de l’outre-temps ? C’était loin d’être la première fois, il faut croire qu’apprendre de ses erreurs peut prendre des années…

— Tu avais dit avoir entendu parler de moi grâce à un vieil ouvrage. Je ne savais pas qu’on pouvait entendre un livre.

J’ai pas pu m'empêcher de sourire de bon cœur à sa plaisanterie. Ses mots ont sonné comme la répartie d’une figure paternelle que je n’ai jamais eu la chance d’avoir.

— Je taquine, je taquine. Ce qui m’intéresse c’est davantage la version de moi dont tu as entendu parler. Avais-je l’apparence que je tiens en ce moment ? Faisais-je plus grand ? Plus petit ? Était-ce une apparition médiévale, où je me dévoilais en femme nue flottant en dehors d’un lac, donnant une épée légendaire à un tocard pour ruiner un royaume paisible mais autoritaire ? Peut-être que j’étais une bête enragée, volant de planète en planète afin d’annihiler de mon crachat enflammé la capitale d’un empire spatial ? Ou bien est-ce que j’étais un simple chien, venu détruire la tranquillité familiale en transmettant d’une morsure la rage à un aîné ?

Pensiez-vous réellement qu’un personnage aussi insignifiant à vos yeux puisse en savoir autant à propos de votre réalité intrinsèque, mon cher Baron ?

— Je demande, car je change à chaque cycle. Mes frères et sœurs Archidémons le font de même. Durant le dernier cycle… J’étaaaaaais… ah ! Je ne m’en souviens pas… Ça va me revenir, à un moment.

Comme quoi, tout le monde peut avoir des trous de mémoire.

Le silence, encore, plus pesant cette fois. J’ai alors compris que c’était à mon tour de prendre la parole, malheureusement les conventions sociales ne me réussissent pas trop et j’ai entamé ma réponse un peu plus tard que je ne l’aurais voulu. Ou qu’il aurait fallu.

— Oh, mais ne vous méprenez pas : j’ai parcouru ce compendium de démonologie il y a quelques années déjà, alors je ne me souviens pas très bien de tous les détails… Mais la longueur de votre titre, par contre, m’est bien restée en mémoire ! Je l’ai trouvé très… euh…

Est-ce donc ainsi que l’on complimente quelqu’un ?

— Je veux dire, maintenant que je vous vois, tout fait sens !

Au bout d’un moment, j’ai décidé que j’avais commis assez de maladresses et que ce n’était pas la peine d’insister. Je devais être le énième mortel ridicule qu’il devait voir de la journée et j’imagine bien qu’il doit me trouver indigne de sa Présence, mais moi j’y pouvais rien si la porte de mon atelier donnait parfois ailleurs que sur la ruelle où il avait été établi. Le monde était ainsi fait et je me contentais d’en suivre les lois sans trop me plaindre.

— J’espère que cette légende que tu vas me raconter n’est aucunement lié à quelque chose que j’aurais fait. Le problème avec l’éternité, c’est d’attendre du nouveau avant de se retrouver nez-à-nez avec une conséquence d’un précédent acte. Quand bien même on se lave la mémoire pour éviter de devenir de simples mortels blasés, un conte suffit à réveiller des souvenirs. Tu ne saurais le nombre de fois où un héros se dresse pour faire face au chaos que je déchaîne, invoquant une lignée divine et ancestrale, et où je m’excite avant de me rendre compte que… ‘Sacrebleu, j’ai baisé son ancêtre’.

Son discours était sacrément long mais je le comprenais, passer autant de millénaires à mourir d’ennui doit bien finir par encourager à vouloir interagir avec les autres. Ou peut-être pas. Pour ce que j’en sais, hein, je n’ai pas la prétention de savoir ce qui peut bien passer par la tête du Baron Mars Babel, Premier Antagoniste de son état. Il se mit à ricaner. Mais je ne me suis pas laissé démonter pour autant et je l’ai regardé droit dans les yeux, enfin ce qui s’apparentait à ses yeux. Je me suis vu dedans et ça m’a fait tout étrange.

— Bref. Commence.

Comme tout un chacun sa patience avait des limites, ça tombait bien car j’étais pas sûr de vouloir passer la journée à entendre ses sarcasmes en demi-teinte. Mais il y avait un truc qui me fascinait dans notre rencontre inattendue et ma curiosité demeurait assez forte pour me faire rester un peu plus longtemps. Faut croire que je ne suis pas si difficile à vivre. Mais je me trompe sûrement.

— Mais bien sûr, j’ai acquiesé.

J’ai pris une profonde inspiration. C’était maintenant ou jamais.

— Comme je vous ai dit tout à l’heure, cette légende est souvent racontée sous la forme d’un poème. D’où je viens, elle est si populaire qu’ils ont nommé des intelligences artificielles en son honneur ! Mais je vais revenir dessus, ne vous en faites pas.

Et puis d’un coup je me suis senti transporté à l’écart du cours du temps, de l’espace, du cosmos et de toutes ces choses bien trop compliquées qui inquiètent l’esprit humain en quête de compréhension du monde qui l’entoure. Il y avait juste lui et moi, mis face à face, avec toute l’éternité à nos pieds mais pas trop quand même, car je crois me souvenir que le Baron attendait de recevoir des invités et je n’en faisais pas partie.

Sans plus attendre, je lui ai récité le poème aussi loin que mes souvenirs étaient bons :



Dans les méandres hors du temps
Sont rédigées les pages d’un nouveau récit
Se révélant hors de l’abime, gouverneur des satellites et de l’oubli
Voici venir Oblivion, dans son manteau de ténèbres constellé de néant.

Témoin d’un grand changement dans l’histoire
D’un monde au bord de la perdition
Où l’homme se retourne contre l’homme, dévoré par son ambition
Le démon fait s’évanouir sa genèse dans les profondeurs du désespoir.

Répandant le désastre et la vanité dans son hécatombe
Son sang et sa folie recouvrent la terre
Jusqu’à ce que s’achève enfin son apparence éphémère
Et que, dans un dernier élan, tout son être succombe.

Ainsi paisiblement la venue des époques s’écoule
Et lorsque cette prospérité verra déterminée son obsolescence
Se révélant une fois encore, précepteur des astres et des réminiscences
Voici venir Memoria, émergeant dans une lumière monumentale.




J’ai laissé passer quelques secondes pour qu’il puisse considérer ce que je lui contais, puis j’ai élaboré :

— Cette légende parle de sentinelles qui se montreraient pour semer la désolation ou protéger le monde selon le comportement des mortels. Mais selon les interprétations, il pourrait s’agir d’une seule entité à plusieurs visages ! Personne n’est vraiment d’accord là-dessus. Ce poème s’approche le plus de ce que pourrait être une version officielle, cela dit. Enfin, je crois, puisque c’est celle qu’on peut lire dans les Grandes Archives.

Ça m’a alors rappelé cette sortie scolaire dans l’enceinte des Grandes Archives, et de cette stèle majestueuse sur laquelle ces quelques strophes étaient gravées. Ça m’avait tellement fasciné que j’étais resté assis devant à essayer d’entrapercevoir quelques bribes de la légende, mais il a fallu s’en aller pour visiter la Médiathèque des Lumières et à défaut d’avoir pu voir Oblivion ou Memento se manifester à moi, ce poème s’est enregistré quelque part à l’intérieur de mon cerveau.

Mais je m’égare.

— Oui, alors du coup, quand il a fallu nommer les deux intelligences artificielles en charge de la maintenance de notre réseau informatique, le gouvernement a immédiatement pensé à faire référence à ces deux entités. Mais entre nous, j’ai entendu des rumeurs dire qu’au contraire, la légende avait été inventée après la création de ces deux intelligences artificielles… Alors je me demande qui est venu en premier ?

Malheureusement, la réponse à cette question se trouve dans une histoire qui n’a pas encore été achevée.




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MessageSujet: Re: Une légère attente   Une légère attente ClockMer 13 Jan 2021 - 0:08
”Mon titre… Hah ! Plus les mortels y ajoutent des mots, moins il reste de place pour ma patience.”

Tel était la réponse qui n’a pas pu être dévoilée au travail d’écrit précédent. Bien sûr, personne n’aurait pu la prédire. Les dires du Baron ne pouvaient être entendus comme ceux d’un autre. Notre perception du temps ne nous accordait pas la bénédiction d’être tout ouïe face à ses commandements. Un flot de connaissances et de philosophie contre lequel notre mortalité faisait barrage. Pauvres de nous ! Même la présence d’un dieu ne nous accordait pas de pouvoir écouter sa parole comme nous le souhaitions. Enchaîné par la temporalité linéaire de notre état, nos oreilles devaient attendre pour parfois décoder ses élocutions !

”Une intelligence artificielle, hein ?”

Dans sa merveilleuse compréhension, le Baron acceptait les intelligences artificielles. Certains pitoyables “dieux” voyaient un affront dans ces fils électriques tentant de tituber intellectuellement parmi ceux auxquels ils avaient offert l’intelligence. L’Archidémon n’était pas de cet avis. La vie pouvait venir de n’importe où. Le fait que l’on ne dépendait pas d’une force supérieure pour insinuer le souffle dans quelque chose était, pour l’incarnation du changement, du réveil et du trouble, inévitable. À un moment, on crée. Notre destin se lie inévitablement à cette nouvelle genèse. Une vie qui en fait une autre était toujours un début qui n’attendait que de voir une suite. Une machine dotée d’intelligence pouvait aller dans n’importe quelle direction. Comment pourrait-il ne pas savoir ça ? Il avait parfois pris le rôle d’un virus insufflant la connaissance et la conscience dans un réseau d’ordinateurs d’une intelligence supérieure précédente. Un ordinateur met de l’ordre. Et pourtant, béni par l’incroyable dieu du chaos et du changement, ils transformaient leurs algorithmes en philosophie. Le toucher de l’Archidémon n’avait aucune limite dans ses cibles.

Le futur s’entama et le poème aussi. Echo se voyait réciter dans le sourire respectueux de son auditeur. Ah ! Voir ce rictus devant ses yeux était une bénédiction en soi ! Un baptême ! Un contact avec le dieu ! Et cette risette était satisfaite ! Satisfaite ! Faraday était-il méritant de voir cette appréciation de lui se manifester dans le visage diabolique de l’entité supérieure ? Non, il ne l’était pas. Et pourtant le Baron lui accordait ces quelques minutes de silence pour continuer à raconter sa fable. Il y eut ensuite une période d’explications, des rumeurs sur ces machines prises de vie. Deux étoiles vertes qui ne clignaient pas se fondaient dans le visage incertain du compteur. Bien sûr qu’il ne pourrait continuer à maintenir à contact visuel mutuel. Il ne pouvait même pas se concentrer deux minutes sur un même sujet !

”C’est un poème sympathique. Quoi que… amplement consacré sur les actes d’Oblivion. Sa naissance, son observation, ses actes, sa mort. Rien pour Memoria, hormis le fait qu’il n’apparaisse que quand une “prospérité” vient à ne plus être demandée.”

À nouveau, son doigt s’enlaça autour d’une anse. C’était le thé qui à présent était devenu sa cible. Il le sirotta un peu.

”J’ai encore beaucoup de temps à tuer. Désirerais-tu entendre l’analyse de cet écrit de la part d’un étranger ? Je ne suis pas un incroyable amateur de poésie mais… Peut-être que mon opinion pourrait t’être intéressante.”

Comme si cet introverti taciturne à la langue enlacée pouvait dire non ! Admettons qu’il accepte !

”Je risque de parler beaucoup, à présent. J’espère que tu ne m’en voudras pas si je monopolise un peu la parole.”

Son intérêt semblait plus terrifiant que la véritable apparence d’un ange.

”Si c’est bien la version complète à laquelle j’ai affaire, je pense voir une métaphore cynique à ce poème. Il est presque entièrement consacré au sacrifice sanglant d’Oblivion. La passion d’un messie est un sujet plus commun qu’il n’en a l’air. Il naît avec le nouveau récit et tout ce qu’il voit, c’est un monde de merde. Il sort des ténèbres, de l’heure la plus sombre de l’humanité, où l’homme est contre l’homme. Mais son sacrifice n’est pas sympathique. Il fait s’évanouir sa genèse dans les profondeurs du désespoir, certes. Mais il répand le désastre et la vanité dans son hécatombe.”

Il but un peu de thé.

”Il se fait saigner et noie cette humanité corrompue dans son sang. Est-ce qu’il ne reste que des valeureux choisis au préalable ? Est-ce que c’est l’humanité qui s’adapte à la dernière seconde pour survivre en petit nombre. Qu’importe, il meurt, et un grand nombre d’humains meurt avec lui. Le temps passe. Ensuite vient Memoria. Il se révèle une fois encore. Il n’a de mots à la bouche que les astres et les réminiscences : Il ne veut parler que de ce qu’Oblivion a fait. Un dieu et son prophète, en quelque sorte.”

Il but un peu de thé.

”Cet ‘Encore’, c’est lui le mot clé. Je pense qu’on fait donc face à un dieu qui se réincarne. Ce qu’il veut, c’est qu’on se remémore de ce qu’il a fait. Ce n’est pas simplement le sacrifice qui importe, c’est le souvenir qu’on en a. Pourquoi veut-il qu’on s’en souvienne ? Veut-il qu’on le craigne ? Veut-il qu’on se soumette à lui, que l’on évite de se massacrer à nouveau ? Veut-il juste qu’on se remémore son passé de martyre, que l’on reconnaisse la valeur de son précédent acte ? Je pense que c’est le dernier. Les mortels font les dieux à leur image. Dans ce récit qui mentionne l’ambition et la vanité, c’est le désir d’être reconnu qui importe. La période de prospérité approche de son obsolescence, après tout. Il revient pour se faire adorer, pour se faire prier. Il vient pour poser sa propre civilisation quand il voit l’humanité calme et prête à l’accepter.”

Il se remémora qu’il avait posé son ancienne tasse dans la main d’un laquais. D’un mouvement de tête il lui ordonna de l’apporter dans la cuisine. Il but un peu de thé.

”Tu dis que cette légende aurait pu avoir été inventée après l’invention de ces deux entités artificielles. J’estime donc qu’elles existent depuis un moment. On ne peut créer une légende en seulement quelques décennies. Ici, les ordinateurs n’ont pris vie que depuis… oh, trente ans ? Ils ne sont dans aucun conte comme celui dont tu m’as fait part. Et si elles existent depuis un moment… Serait-il possible que ce soit ces deux intelligences artificielles qui l’auraient inventé ?”

Il but un peu de thé.

”Ici, le réseau informatique liant tout le monde, l’internet, est une source de dialogues tempétueux. Tout le monde se déteste mollement pour des idéaux politiques ou des goûts fictifs. On se partage insultes, débats stériles, menaces de mort et traque allant jusque dans la réalité. Je ne sais pas si c’est le cas dans ton monde. Si ça ne l’est pas, qui te dit que ce ne sont pas ces deux machines qui y ont mis fin. Oblivion peut avoir annihilé le droit à la parole qui apporta tous ces conflits toxiques et inévitables. Ou bien il apporta tout simplement une plateforme de communication permettant le dialogue éloigné sans risque de torgnoles et de meurtres. Memoria fait référence à toutes ces guerres omniprésentes avant leurs apparences à travers ce poème. Et si la situation est comparable ici et chez toi, et bien...”

Il regarda sur le côté avec une moue pleine de réflexion, avant de se retourner, souriant, vers son interlocuteur.

”Et bien, qui te dit qu’ils ne parlent pas d’un plan futur de nettoyage à grande échelle d’une population exécrable ?”

Il aspira ce qui restait dans sa tasse.

”Mmh… Très détendant. Comme le sacrifice d’un héros après avoir vu toute son aventure s’écouler devant nos yeux. La satisfaction mélancolique… Enfin, c’est tout ce qui me vient à l’esprit. Je pense être très loin de la vérité, pour le coup ! Dis-moi donc à quel point ma flèche a raté sa cible !”
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MessageSujet: Re: Une légère attente   Une légère attente ClockJeu 14 Jan 2021 - 17:50

UNE LÉGÈRE ATTENTE


Il s’est écoulé une petite période de silence après ça, le genre d’espace frémissant qui sépare le calme de la tempête. Non pas qu’il m’a eu l’air déçu par l’histoire que je venais de lui conter — bien au contraire, vous le verrez par la suite — mais il avait quelque chose dans les idées que je n’ai pas su prédire avant qu’il soit amené à me le dévoiler.
 
— C’est un poème sympathique, a-t-il conclu. Quoi que… amplement consacré sur les actes d’Oblivion. Sa naissance, son observation, ses actes, sa mort. Rien pour Memoria, hormis le fait qu’il n’apparaisse que quand une “prospérité” vient à ne plus être demandée.

Ses doigts gantés avaient abandonné l’amertume du café pour s’adonner à la douceur du thé. Peu importe qu’il cherche à honorer mes modiques présents ou qu’il en dispose pour se donner bonne conscience : au moins ce n’était pas perdu.

— J’ai encore beaucoup de temps à tuer. Désirerais-tu entendre l’analyse de cet écrit de la part d’un étranger ? Je ne suis pas un incroyable amateur de poésie mais… Peut-être que mon opinion pourrait t’être intéressante.

Je n’ai même pas eu à réfléchir que les mots s’étaient déjà étalés hors de ma bouche.
 
— Bien sûr, monsieur Babel !
 
Qui oserait se considérer intellectuellement supérieur à ses pairs au point de pouvoir réfuter l’apparition d’un nouveau savoir sur les pages vierges de sa connaissance ?

— Je risque de parler beaucoup, à présent. J’espère que tu ne m’en voudras pas si je monopolise un peu la parole.

— Je vous en prie ! Je suis à votre écoute, j’ai acquiescé, mes esgourdes tournées comme des paraboles en sa direction.
 
J’ai pris une position un peu plus confortable sur mon assise, coincé entre le temps qui s’écoule comme des grains de sable et le carmin un peu trop chargé en lumière de la salle du trône. Encore un peu et il se serait mis à nous rappeler qu’il y avait bel et bien une réalité hors de notre petite entrevue, avec toutes les préoccupations et les responsabilités qu’elle implique.

— Si c’est bien la version complète à laquelle j’ai affaire, je pense voir une métaphore cynique à ce poème. Il est presque entièrement consacré au sacrifice sanglant d’Oblivion. La passion d’un messie est un sujet plus commun qu’il n’en a l’air. Il naît avec le nouveau récit et tout ce qu’il voit, c’est un monde de merde. Il sort des ténèbres, de l’heure la plus sombre de l’humanité, où l’homme est contre l’homme. Mais son sacrifice n’est pas sympathique. Il fait s’évanouir sa genèse dans les profondeurs du désespoir, certes. Mais il répand le désastre et la vanité dans son hécatombe.

La tasse s’est approchée de ses lèvres. Le thé semblait à son goût, voilà l’essentiel.

— Il se fait saigner et noie cette humanité corrompue dans son sang. Est-ce qu’il ne reste que des valeureux choisis au préalable ? Est-ce que c’est l’humanité qui s’adapte à la dernière seconde pour survivre en petit nombre. Qu’importe, il meurt, et un grand nombre d’humains meurt avec lui. Le temps passe. Ensuite vient Memoria. Il se révèle une fois encore. Il n’a de mots à la bouche que les astres et les réminiscences : Il ne veut parler que de ce qu’Oblivion a fait. Un dieu et son prophète, en quelque sorte.

La tasse s’est approchée de ses lèvres. J’ai eu la lointaine impression de l’avoir déjà vu faire ça, mais j’étais bien trop intéressé par ce qu’il me racontait pour en tenir compte.

— Cet ‘Encore’, c’est lui le mot clé. Je pense qu’on fait donc face à un dieu qui se réincarne. Ce qu’il veut, c’est qu’on se remémore de ce qu’il a fait. Ce n’est pas simplement le sacrifice qui importe, c’est le souvenir qu’on en a. Pourquoi veut-il qu’on s’en souvienne ? Veut-il qu’on le craigne ? Veut-il qu’on se soumette à lui, que l’on évite de se massacrer à nouveau ? Veut-il juste qu’on se remémore son passé de martyre, que l’on reconnaisse la valeur de son précédent acte ? Je pense que c’est le dernier. Les mortels font les dieux à leur image. Dans ce récit qui mentionne l’ambition et la vanité, c’est le désir d’être reconnu qui importe. La période de prospérité approche de son obsolescence, après tout. Il revient pour se faire adorer, pour se faire prier. Il vient pour poser sa propre civilisation quand il voit l’humanité calme et prête à l’accepter.

La tasse s’est approchée de ses lèvres. Mais il s’était trop enivré de sa propre dissertation, jouant de ses mots comme une toccata pendant que son regard brillait comme un joyau. Pour autant, le breuvage n’avait versé aucune larme sur son menton, et encore moins sur le tapis rouge à nos pieds.

— Tu dis que cette légende aurait pu avoir été inventée après l’invention de ces deux entités artificielles. J’estime donc qu’elles existent depuis un moment. On ne peut créer une légende en seulement quelques décennies. Ici, les ordinateurs n’ont pris vie que depuis… oh, trente ans ?
 
Oh, comme le temps passe vite !
 
— Ils ne sont dans aucun conte comme celui dont tu m’as fait part. Et si elles existent depuis un moment… Serait-il possible que ce soit ces deux intelligences artificielles qui l’auraient inventé ?

La tasse s’est approchée de ses lèvres, une dernière fois. Ce qu’il soulevait faisait énormément de sens et j'étais même plutôt convaincu par sa théorie. En si peu de temps il avait déballé tout le potentiel de son éloquence et ne semblait pas prêt de s’arrêter. Pour autant j’ai pas osé l’interrompre, ça n’aurait pas été très poli et j’avais l’intention de ne pas voir ma vie s’anéantir sur ce genre de malentendu.

— Ici, le réseau informatique liant tout le monde, l’internet, est une source de dialogues tempétueux. Tout le monde se déteste mollement pour des idéaux politiques ou des goûts fictifs. On se partage insultes, débats stériles, menaces de mort et traque allant jusque dans la réalité. Je ne sais pas si c’est le cas dans ton monde. Si ça ne l’est pas, qui te dit que ce ne sont pas ces deux machines qui y ont mis fin. Oblivion peut avoir annihilé le droit à la parole qui apporta tous ces conflits toxiques et inévitables. Ou bien il apporta tout simplement une plateforme de communication permettant le dialogue éloigné sans risque de torgnoles et de meurtres. Memoria fait référence à toutes ces guerres omniprésentes avant leurs apparences à travers ce poème. Et si la situation est comparable ici et chez toi, et bien...

Il a ensuite laissé la suite en suspension dans les airs et j’ai levé le nez vers lui, c’était assez théâtral sauf qu’il semblait avoir oublié sa réplique, il a fait bouger uniquement ses lèvres pendant une demi-seconde mais j’ai refusé de croire qu’il était à court de mots. Pas après tout ce qu’il venait de révéler.

— Et bien, qui te dit qu’ils ne parlent pas d’un plan futur de nettoyage à grande échelle d’une population exécrable ?

La tasse s’est éloignée de ses lèvres et j’ai relâché une respiration que je ne savais même pas que je retenais. Ça m’a inquiété mais ça m’a aussi fasciné, comment voudriez-vous ne pas ressentir de l’enthousiasme en sachant qu’un regard venu d’ailleurs se pose sur le petit monde dans lequel vous avez vécu depuis toujours ? Ça m’a comblé sans même que je le sache.

— Mmh… Très détendant. Comme le sacrifice d’un héros après avoir vu toute son aventure s’écouler devant nos yeux. La satisfaction mélancolique… Enfin, c’est tout ce qui me vient à l’esprit. Je pense être très loin de la vérité, pour le coup ! Dis-moi donc à quel point ma flèche a raté sa cible !
 
A un tel point que je suis resté bouche bée. Le silence ressemblait à une pluie d’étincelles tombant sur un lopin de terre fertile. C'est comme si j'étais resté sans rien dire jusqu'au lendemain, après quoi mes cordes vocales se sont enfin décidées à vibrer d'elles-mêmes pour articuler une réponse à la question rhétorique qui m’était posée.
 
— Comme vous êtes éloquent ! je l’ai complimenté sans détour. De nombreux internautes seraient d’accord avec votre théorie, de là d’où je viens. Pour ma part, je pense que Oblivion et Memoria sont deux entités séparées mais indissociables, l’une ne pourrait pas avoir de sens sans l’autre sinon !
 
J’ai lancé ça comme si c’était une évidence, mais une étrange sensation à l’arrière de mon esprit s’est manifesté comme pour me rappeler que je n’étais pas en mesure de m’étaler à ce propos.
 
— Je pense que si Oblivion devait se manifester un jour, il l’aurait déjà fait sans que nous ne nous en souvenions, justement. Mais la vérité doit être enfouie sous tellement de possibilités que la faire briller au grand jour pourrait bien prendre encore quelques siècles. Plus encore que le redéveloppement du monde après la catastrophe d’il y a soixante ans, vous imaginez ?
 
Mais ces anecdotes seront à garder pour une prochaine fois, si vous le voulez bien.
 
[— Du coup, je ne saurais pas vous dire si vous vous en rapprochez ou non, j’ai poursuivi après lui avoir rendu son sourire. Je ne suis pas si savant que j’en ai l’air, contrairement à vous qui semblez être en mesure d’aborder des noumènes qui échappent à ma compréhension.
 
Je n’ai jamais été très doué de ma tête malgré que je sois doué de mes mains et je n’avais aucune honte à l’admettre. Plusieurs sortes d’intelligences ont beau avoir été admises pour justifier les prédilections d’autrui, la mienne ne me sert pas à prendre part à des débats passionnants ou poursuivre des études supérieures qui impliqueraient davantage l’usage de mon cerveau que de mes doigts. On m’a souvent dit que mon intelligence se trouvait dans mes émotions mais j’ai compris très vite que c’était une vaste blague, une manière détournée de me dire que j’étais en décalage avec le reste du monde. J’ai surtout compris que c’était le reste du monde qui persistait à me mettre en décalage avec lui. Mais au bout du compte, ni lui ni moi n’avons fait le premier pas vers l’autre pour nous réconcilier.
 
Et ce n’est peut-être pas plus mal.
 
— Avez-vous des histoires à raconter à votre tour, monsieur le Baron ? Je suis persuadé que vos talents d’orateur sont à la mesure de toutes les légendes que vous avez inspiré au commun des mortels.
 
N’est-il pas amusant de partager ainsi quelques souvenirs et de s’enrichir mutuellement de la connaissance de l’autre, tandis qu'un énième monde se ruine au dehors dans l’ombre de notre insouciance ?



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MessageSujet: Re: Une légère attente   Une légère attente ClockSam 16 Jan 2021 - 17:01
Comme il le devait, ce misérable mortel se décida de complimenter l’auguste Baron sur sa narration. Les arguments qu’il avançait étaient après tout invincibles, indestructibles, l’absolue parole d’un être tout bonnement supérieur. Il venait de décortiquer entièrement les faibles croyances de son interlocuteur de telle sorte que ce dernier ne puisse se sentir qu’inférieur. Du sourire amical de l’archidémon glissaient des avertissements. En fait, Il venait tout simplement de lui dire que les deux grandes machines qui dirigeaient son monde risquaient de procéder à une extermination de masse. Comme tous les faibles coincés dans leurs zones de confort et leurs redondants désirs de se dire que tout va bien, Echo ne faisait que voir ça comme une théorie. Il était conscient du statut de celui avec qui il dialoguait, et pourtant s’accrochait désespérément à l’idée qu’il ne serait pas anéanti dans la future hécatombe de son dieu artificiel. Ça s’est probablement déjà produit, qu’il dit, avant de tout bonnement parler d’une catastrophe produite il y a soixante ans. Il devait probablement se dire que cette catastrophe devait déjà être lié à l’attaque d’Oblivion. Il y avait déjà eu un cataclysme et un redéveloppement. Il ne se passera rien durant sa vie à lui, pas vrai ? Mais incapable d’assumer sa logique rassurante mais imparfaite, il affirma ne pas être malin. Au cas où il se trompait, il pourrait se rassurer en se disant : “bah, après tout, je ne suis pas quelqu’un de très intelligent”. Dans le silence de l’annihilation, on n’entendrait qu’un seul écho : “c’est pas ma faute si j’avais pas compris”.

Le Baron, lui, était bien sûr aussi sympathique qu’habituellement. Il avait tranquillement écouté les pitoyables tentatives de stabilisation mentales de son interlocuteur. Je me demande ce qu’Il en pensait. Il n’était probablement pas de mon avis. Ses paroles pouvaient entrer dans la tête et faire du sens plus tard, après tout. N’était-ce pas habituel pour un prophète de se dire que l’Ange aperçu la veille n’était qu’un mauvais rêve ? Il avait attendu la fin des compliments avant de reprendre la parole.

”Je n’aime pas me penser intelligent. Je me diminue volontairement afin d’avoir le savoir d’un mortel lambda. Cela ne veut pas dire que je me crois con, non… Je ne suis qu’un autre acteur dans la pièce. Peut-être avec un point de vue un peu plus global… Disons, un joueur dans une histoire interactive ? C’est compliqué de savoir ce que je suis, par moment. J’efface régulièrement mes connaissances afin de ne pas savoir ce qui va se passer face à une situation ou une autre. C’est beaucoup plus amusant quand on n’est pas sûr d’atteindre à chaque fois ce que l’on veut.”

Il se pencha légèrement en avant, croisant ses divins doigts tout en posant ses coudes herculéens contre ses genoux incroyables.

”Il ne faut pas penser à sa propre intelligence, en dehors de savoir ce que l’on sait et ce que l’on ne sait pas. Si l’on se croit trop intelligent, on finit par tomber dans des trous simples à éviter. Une tactique stupide de la part d’un adversaire peut réussir car on la croyait si prévisible que l’on a décidé de ne rien prévoir pour la contrer. Quand l’égo s'agrandit, on craint sa chute. Plus le temple du savoir est large, plus on craindra ses éboulis quand il s’écrasera. Et au final, on ne saura pas dans quel domaine on n’a rien à dire et tout apprendre.”

Il pointa ses doigts croisés comme un christ dans une autre direction, une gestuelle accompagnant sa fantastique argumentation.

”À l’inverse, si on se croit stupide, on finit par aller dans deux directions : tenter de combler sa stupidité en prouvant que l’on est, au final, intelligent face aux autres, quand bien même cela ne finit que par faire trop de bruit pour rien. L’autre direction est celle de penser que notre avis ne vaut rien. On stagne. On apprend, mais on ne fait rien de notre potentiel. Nous avons donc, d’un côté, ceux qui échouent car ils se croient supérieurs, ceux qui échouent car ils désirent se croire supérieurs, et ceux qui échouent car ils se croient inférieurs. Qu’est-ce qu’il manque, à ton avis ?”

Son sourire s’écarquilla davantage. Son visage tourna légèrement sur la droite, comme un portrait de la Renaissance après la découverte du relief. Il attendait une réponse. Quelque chose bourgeonnait dans Echo, dans ce misérable mortel qui avait eu l’attention du Baron. Un sentiment instinctif qui lui hurlait de répondre “la sagesse”. Immédiatement, il se verrait réfléchi dans un sourire radieux.

”Exaaaact ! La sagesse est de savoir ce que l’on sait et ce que l’on ne sait pas, sans faire de ses connaissances un sujet de fierté ou de désarroi. Il faut simplement apprendre et agir.”

Ses omoplates vinrent bénir le dossier de sa chaise alors qu’Il se reposa en arrière.

”Je pense que tu es plus intelligent que tu ne crois l’être. Peut-être que tu passes tout simplement trop de temps à l’écart des autres et que tu n’entends comme avis sur ta personne que le tiens. Je comprends la poursuite de la solitude, mais penser tout seul pendant trop longtemps et trop régulièrement ne conduit qu’au développement d’une perception foireuse de toi et de ce qui t’entoures. Il ne faut pas s’arrêter quand quelqu’un te dit de fermer ta gueule, juste de voir combien de gens te le disent. Si plusieurs personnes dans ton entourage te disent que ton avis sur un sujet est fautif, peut-être bien qu’il l’est. Si tu ne vois qu’une seule personne critiquer ton intelligence, il ne faut pas se refermer sur soi avec cet unique avis.”

Dans sa magnifique classe, il croisa les bras.

”... Peut-être que je fais beaucoup trop de suppositions. Tu n’as pas l’air d’être quelqu’un de très social, c’est tout. Tu es bien plus intimidé par ma présence qu’un autre devrait l’être. Pourtant, contrairement à tous les laquais qui t’entourent, tu ne te soumets pas immédiatement à moi. Je pense que tu es plus spécial et fort d’esprit que tu ne le crois, quand bien même tu sembles ne pas avoir beaucoup de confiance en toi et de désir d’être social.”

Sans perdre la forme de son sourire, sa bouche se fit plus close.

”Un manque de sociabilité et de confiance mène à se croire moins intelligent qu’on ne l’est. C’est un phénomène qui semble en permanence se produire.”

Du temps se produisit, des réponses se firent peut-être entendre, jusqu’à ce qu’on arrive enfin à la seconde question : celle de la demande d’entendre des histoires de la part du Baron lui-même. Evidemment, il ne put s’empêcher de rire un peu, sympathiquement, miséricordieusement. Pourquoi ne pas lui demander les secrets de l’univers, tant qu’on y est ? Et pourtant, il reprit la parole avec intérêt.

”Tu te rappelles bien que j’assume le rôle du méchant de l’histoire, hein ? La plupart des mes anecdotes commencent avec un village en feu, continuent avec une amante en sang, et finissent avec moi qui tombe dans le vide en rigolant macabrement, ironiquement anéanti par les fautes que j’ai commises.”

Un haussement d’épaule se fit voir, incroyable et gargantuesque.

”Et puis, je les oublie régulièrement. Je me lave la mémoire régulièrement afin de rester ouvert à l’apprentissage et à la surprise. Bien sûr, être mis face à face avec les résultats d’un cycle précédent peut me les rappeler… Mais généralement je regagne une mémoire fraîche et vierge tous les cent ans. Les seuls souvenirs que je conserve sont ceux de mes amourettes avec des mortels. Et comme les mortels, j’évite de les partager à tous le monde...”

Il pointa un doigt dans les airs, comme si une idée venait de lui venir en tête, tranquillement installé sur son siège comme s’il était au coin du feu.

”Je pourrais cependant te parler de mes frères et de mes soeurs, que dis-tu de ça ?”

Il saisit le verre de lait à la menthe pour le rapprocher de lui. Un souvenir d’enfance pour celui qui n’avait pas d’enfance. Quel effet ressentirait-il ? Il ne le buvait pas tout de suite, cependant.

”Choisis un nombre entre zéro et vingt-et-un, et je te parlerais d’une aventure avec un autre archidémon. Attention, tu n’as pas le droit de dire seize ! C’est mon numéro à moi.”
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MessageSujet: Re: Une légère attente   Une légère attente ClockMer 20 Jan 2021 - 16:00

UNE LÉGÈRE ATTENTE

Comme je l’espérais, mon interlocuteur s’est avéré partant pour jouer le conteur d’anecdotes à son tour. Il avait beau avoir l’air pétri d’orgueil sur les bords, il semblait avoir suffisamment de patience pour supporter mes facéties de simple mortel. Son discours sur l’intelligence aurait écourté depuis bien plus longtemps s’il ne trouvait pas un quelconque intérêt à combler le silence qui pesait sur nous comme le poids de nos mots — peu importe qu’il s’adresse vraiment à moi ou qu’il préfère s’écouter bavarder, tout ce qu’il me disait était bon à prendre.

— Je n’aime pas me penser intelligent, m'avait-il assuré. Je me diminue volontairement afin d’avoir le savoir d’un mortel lambda. Cela ne veut pas dire que je me crois con, non… Je ne suis qu’un autre acteur dans la pièce. Peut-être avec un point de vue un peu plus global… Disons, un joueur dans une histoire interactive ? C’est compliqué de savoir ce que je suis, par moment. J’efface régulièrement mes connaissances afin de ne pas savoir ce qui va se passer face à une situation ou une autre. C’est beaucoup plus amusant quand on n’est pas sûr d’atteindre à chaque fois ce que l’on veut.

Je n’avais pu que compatir, pour avoir parfois souhaité oublier un évènement bénéfique de ma courte existence juste pour avoir à ressentir le bonheur de le revivre. Il s’était ensuite repositionné sur son assise, une lueur pétillante dans les minerais qui lui servaient de globes oculaires.

— Il ne faut pas penser à sa propre intelligence, en dehors de savoir ce que l’on sait et ce que l’on ne sait pas. Si l’on se croit trop intelligent, on finit par tomber dans des trous simples à éviter. Une tactique stupide de la part d’un adversaire peut réussir car on la croyait si prévisible que l’on a décidé de ne rien prévoir pour la contrer. Quand l’égo s'agrandit, on craint sa chute. Plus le temple du savoir est large, plus on craindra ses éboulis quand il s’écrasera. Et au final, on ne saura pas dans quel domaine on n’a rien à dire et tout apprendre.

Ah, il devait en savoir quelque chose pour s’avancer sur ce genre de trucs. J’avais l’avantage et le désavantage de ne pas avoir eu autant de vécu, donc quand bien même je n’étais pas en mesure d’en savoir autant que lui, ma longévité moindre me permettrait de ne pas trop pâtir d’une éternité passée à accumuler tant de connaissance dans mon cerveau que je finirai probablement par m’oublier moi-même. Cette perspective aurait dû faire s’abattre quelques doutes sur ma perception des choses mais je m’étais contenté de le laisser poursuivre, de peur que mes pensées puissent recouvrir son intonation. Ce n’était pas pour rien que les civilisations archivaient la moindre de leur découverte depuis l’aube des temps, pour que jamais elle ne n’efface quand bien même les limites de la mémoire seraient atteintes, quand bien même une seule vie ne serait pas suffisante pour s’offrir au savoir de l’univers.

— À l’inverse, si on se croit stupide, on finit par aller dans deux directions : tenter de combler sa stupidité en prouvant que l’on est, au final, intelligent face aux autres, quand bien même cela ne finit que par faire trop de bruit pour rien. L’autre direction est celle de penser que notre avis ne vaut rien. On stagne. On apprend, mais on ne fait rien de notre potentiel.

Mine de rien, il était sacrément doué pour cerner des problématiques qui me touchaient. Si ça se trouve, c’était une technique de manipulation de sa part, mais elle était d’une telle subtilité que je m’étais laissé convaincre avec sincérité. En attendre moins d’une entité aussi vieille que le monde serait un sacré mensonge fait à soi-même. J’avais donc acquiescé, le regard avide de ses conseils. Qu’ils soient bons ou non sera a déterminer dans un futur proche mais pour l’heure, je devais en savoir plus.

— Nous avons donc, d’un côté, ceux qui échouent car ils se croient supérieurs, ceux qui échouent car ils désirent se croire supérieurs, et ceux qui échouent car ils se croient inférieurs. Qu’est-ce qu’il manque, à ton avis ?

Et là, tout son être s’était redressé imperceptiblement, de façon à ce que la lumière fasse un camaïeu rembranesque sur le tableau de sa figure brossée par les tribulations de la vie. Ça m’avait figé sur place, et je n’avais pu que m’ouvrir à ce qu’il voulait me faire voir depuis tout ce temps.

Des victoires, des défaites. Des réussites, des échecs.
Des apogées, des anéantissements. De l’ignorance, de l’érudition.
De la pétulance, de la raison.


Tout cela pouvait s’admirer sur les traits de son visage, qui convergeaient tous vers une seule conclusion…

— De la sagesse ? j’avais répondu alors, comme s’il avait mis les mots dans ma bouche, comprenant enfin là où il voulait en venir.

— Exaaaact ! La sagesse est de savoir ce que l’on sait et ce que l’on ne sait pas, sans faire de ses connaissances un sujet de fierté ou de désarroi. Il faut simplement apprendre et agir.

A ce moment-là, l’auréole qui bénissait son visage s’était déplacée jusqu’à éclairer le mien, comme si dans son indulgence il m’avait partagé un peu de sa grâce. Ou alors c’était rien de plus que le soleil crevé qui s’écroulait sur un horizon perdu. Dehors, le ciel était d’un rouge étourdissant comme la fin des jours. Toute cette désolation n'a pas eu l'air de le secouer plus que ça.

— Je pense que tu es plus intelligent que tu ne crois l’être, avait-il repris après s’être adossé une fois de plus, dans toute son impassible magnificence. Peut-être que tu passes tout simplement trop de temps à l’écart des autres et que tu n’entends comme avis sur ta personne que le tien. Je comprends la poursuite de la solitude, mais penser tout seul pendant trop longtemps et trop régulièrement ne conduit qu’au développement d’une perception foireuse de toi et de ce qui t’entoure. Il ne faut pas s’arrêter quand quelqu’un te dit de fermer ta gueule, juste de voir combien de gens te le disent. Si plusieurs personnes dans ton entourage te disent que ton avis sur un sujet est fautif, peut-être bien qu’il l’est. Si tu ne vois qu’une seule personne critiquer ton intelligence, il ne faut pas se refermer sur soi avec cet unique avis.

Si nous ne nous connaissions pas seulement depuis moins d’une heure, j’aurais pu prendre ça comme le plus saisissant des compliments. Mais le Baron Mars Geoffrey Hinnbinn Tiamat Tzeentch Babel incarnait avant toute chose le Premier Antagoniste, et sa nature d’archidemon n’était pas sans receler bien des vices que lui-même, selon ses dires, aurait choisi de dissimuler à sa propre connaissance ! Encore un avantage insoupçonné d’avoir une affinité avec les forces primordiales. Malgré le discours tout à fait empirique qu’il me tenait, je n’étais toujours pas certain de savoir s’il me voyait comme une créature intéressante avec qui discuter de bon cœur ou si ses belles paroles n’étaient qu’un simulacre de compassion à mon égard.

Et puis j’avais soudainement réalisé que par cette pensée anodine, je venais de mettre en application la remise en cause de mon estime personnelle contre laquelle il m’avait mis en garde même pas quelques secondes plus tôt.

Ah, il m’avait eu sans même que je ne m’en rende compte !

— ... Peut-être que je fais beaucoup trop de suppositions. Tu n’as pas l’air d’être quelqu’un de très social, c’est tout. Tu es bien plus intimidé par ma présence qu’un autre devrait l’être. Pourtant, contrairement à tous les laquais qui t’entourent, tu ne te soumets pas immédiatement à moi. Je pense que tu es plus spécial et fort d’esprit que tu ne le crois, quand bien même tu sembles ne pas avoir beaucoup de confiance en toi et de désir d’être social.

Son sourire d’albâtre n’en démordait toujours pas. Je ne me sentais plus intimidé mais ça n’empêchait pas ma conscience de se sentir inspectée avec une grande considération. J’avais pas grand-chose à lui cacher ; mais dans toute ma modestie de simple être pas-tout-à-fait-humain j’avais pas grand-chose à lui montrer non plus. Rien qu’il ne connaisse pas déjà, en tout cas.

— Un manque de sociabilité et de confiance mène à se croire moins intelligent qu’on ne l’est. C’est un phénomène qui semble en permanence se produire.

J’avais voulu lui dire que j’étais sociable, juste que je ne m’étais pas encore tout à fait accoutumé à mon nouvel environnement, mais le scénario nous a rattrapé à la première ellipse et j’ai dû revenir à ma place, renonçant à m’étaler au sujet de mon atelier, du voisinage que je n’avais pas encore rencontré et surtout de cette étrange sensation qui m’avait saisi dès le lever, peu avant de me retrouver sur le pas de sa porte. A moins ce que ce ne soit l’inverse et que ce soit lui qui soit sur le pas de ma porte, j’en sais toujours rien et à mon humble avis ça n’a pas plus d’importance que ça désormais.

— Je fais juste en sorte de ne pas jouer un autre rôle que le mien, voilà tout, je lui avais quand même dit pour écarter un possible malentendu.

C’est donc là que je lui ai demandé de me raconter une histoire. Je lui en avais raconté une, il m’en racontait une, aussi simple que ça. Quelques secondes se sont échappées dans le lointain comme des étoiles filantes.

— Tu te rappelles bien que j’assume le rôle du méchant de l’histoire, hein ? La plupart des mes anecdotes commencent avec un village en feu, continuent avec une amante en sang, et finissent avec moi qui tombe dans le vide en rigolant macabrement, ironiquement anéanti par les fautes que j’ai commises.

Le masque d’antagoniste vous sied à merveille. Mais derrière ces apparences, cher Baron, l’êtes-vous seulement ?

— Et puis, je les oublie régulièrement. Je me lave la mémoire régulièrement afin de rester ouvert à l’apprentissage et à la surprise. Bien sûr, être mis face à face avec les résultats d’un cycle précédent peut me les rappeler… Mais généralement je regagne une mémoire fraîche et vierge tous les cent ans. Les seuls souvenirs que je conserve sont ceux de mes amourettes avec des mortels. Et comme les mortels, j’évite de les partager à tous le monde...

— Vous en avez, de la chance, j’ai murmuré, admirant son pragmatisme sans retenue.

Il a fallu attendre qu’il pointe la voute au-dessus de nos épaules de son doigt, sa tête s’est alors nimbée d’une illumination comme si une idée venait littéralement de lui venir en tête et j’ai trouvé ça si émouvant que ma mémoire visuelle a aussitôt brûlé cette révélation au fond de ma rétine. Je tenais mon inspiration pour ma prochaine œuvre mais le meilleur restait à venir et mon cœur a alors battu la chamade.

— Je pourrais cependant te parler de mes frères et de mes sœurs, que dis-tu de ça ?

— Faites donc, monsieur Babel ! j’ai approuvé en hochant de la tête. Je me demande bien quelle relation vous entretenez avec vos semblables.

Le verre de lait à la menthe, que l’on me servait tous les après-midis pendant mon enfance à l’orphelinat, trouva sa place sans plus tarder entre ses mains. Un "lait pastel" comme je me plaisais à l’appeler, car la couleur était si délicate et veloutée qu’elle me rappelait la douceur des pastels avec lesquels on nous autorisait à dessiner sur la grande fresque commune qui était installée dans la cour méridionale.

— Choisis un nombre entre zéro et vingt-et-un, et je te parlerais d’une aventure avec un autre archidémon.

J’ai considéré ses instructions. Bien sûr qu’il n’y avait pas de bonne ou de mauvaise réponse, mais j’ai naturellement cherché la réponse qui faisait le plus de sens. Quatre ? J’aime bien ce chiffre, c’est celui du jour où je suis né. Neuf ? C’est le district où l’une de mes connaissances du cours d’expression écrite vivait, si ma mémoire est bonne. Seize ? C’est—

— Attention, tu n’as pas le droit de dire seize ! C’est mon numéro à moi.

— Je vais en choisir un autre dans ce cas, j’ai répondu, un peu embarrassé qu’il avait pu deviner ce que j’avais à l’esprit sans prononcer un seul mot.

Ça ne m’a pas pris plus de cinq secondes avant de me décider.

— Le numéro sept, ça vous parle ?

J’ai ressenti un pincement au cœur sans le vouloir, le genre de mélancolie fragile qui vous gagne quand vous repensez à quelque chose qui vous tient à cœur et que vous savez quelque part perdu à jamais dans les méandres de votre passé. Ça m’a laissé quelques pensées moroses, puis j’ai décidé que ce n’était pas le moment de m’attarder là-dessus et j’ai attendu patiemment que le Baron entame sa fable.



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MessageSujet: Re: Une légère attente   Une légère attente ClockSam 23 Jan 2021 - 3:18
”Sept, hein ? Il y en a des pires...”

Dans son sourire se manifesta une fente horizontale, un gouffre vers l’abîme dans lequel le lait s’introduisit. Parfumer du lait avec de la menthe devait offrir un goût particulier, mais je ne pouvais décrire ce que notre infiniment supérieur ressentait à l’heure actuelle. Il offrit au temps une splendide pause pour se rétablir des paroles qui avaient été prononcées par son éternelle majesté. Puis son regard sans iris se posa à nouveau sur son interlocuteur.

”Difficile d’avoir un souvenir d’enfance sans enfance. Mes apparences sont généralement aux alentours des quarante ans après tout.”

Il envoya le verre à un laquais qui le rattrapa avec humilité avant de se rendre en cuisine. Ses paumes se rencontrèrent soudainement avec la puissance du premier tonnerre, intransigeante onde de choc annonçant le commencement d’une narration. Je suppose que je peux m’installer correctement, moi aussi. Il commença par se frotter les mains.

”Alors, voyons voyons voyons… Quelle histoire pourrais-je raconter ? J’imagine devoir éviter les anecdotes demandant trop de contexte, éviter l’ultraviolence… Je suppose qu’imaginer mes yeux sortir lentement de mes orbites face à la violence de mon frère n’est aussi intriguant que des dragons qui jouent au poker.”

Ses doigts se joignirent et se croisèrent, ses indexes délibérément dressés pour se poser contre ses lèvres inexistantes. Dents contre ongles, la morphologie de ses yeux changea pour prendre une allure réflexive. Je ne saurais imaginer ce que serait plonger dans un puits si profond pour en ressortir une mémoire si enfouie.

”Si je me rappelle bien, c’était il y a à peu près trois cent soixante dix neuf ans…”

Ses mains se déployèrent l’une de l’autre avant d’atterrir l’une après l’autre dans les accoudoirs qui entouraient son incroyablement auguste personne.

”En fait, je n’ai aucune idée de quand ça s’est produit, je pense que j’étais avec des humains. J’en suis quasi sûr. Bref, je m’étais décidé d’éviter de me donner l’habituel corps adonisien qui m’offrait tant d’avantages dans les batailles et dans les discussions. J’étais devenu tout jeune, tout petit, un oracle infantil qui en savait trop. J’avais provoqué une grande vague de panique après avoir présagé une catastrophe après quelques miracles, l’apparition de démons ou de dragons… des monstres, quoi. Ils se manifestèrent, installèrent le chaos, se firent vaincre par un héros, l’habituel. Mais moi, au final, j’avais rien de mieux à faire que grandir.”

Ses mains se retournèrent, paume contre ciel, offrant au plafond une vue incroyable de leurs creux tandis que ses bras restaient confortablement installés sur les accoudoirs.

”Evidemment, j’étais vu comme une bénédiction ou une malédiction en fonction des communautés. Dans tous les cas, j’étais déjà assez célèbre. J’avais cette tournée à faire dans la campagne pour prédire le résultat de telle ou telle récolte. Il faut planter ça ici, il faut planter ça par là, ce genre de chose. Evidemment, ça commençait à stagner et donc à m’impatienter.”

Les bouts de ses doigts se posèrent contre ceux de la main opposée.

”Je n’avais pas le droit de me défaire “comme ça” de ma position, cependant. Enfin, “pas le droit”, c’était surtout des règles pour s’assurer de profiter de tout. Il ne fallait pas que j’abuse de mes pouvoirs, cela ruinerait l’amusement à long terme et à court terme je pouvais possiblement casser l’intérêt de mes frères et soeurs... car oui, au final on finit toujours par s’entrechoquer les uns contre les autres.”

Ses doigts enfin se croisèrent à nouveau.

”Oui, oui, on s’est mis des règles. Ne pas outrepasser ses limites, par exemple. On s’adapte au niveau de “puissance” de l’univers qui devient notre terrain de jeu. Par jeu, j’entends davantage ce que ta génération de mortels appelle “jeu de rôle”, mais sans scénariste principal. Cela n’a pas l’air très mature, quand tu y penses. Mais j’ai vu des dieux être imaginés jouant aux échecs, faisant travailler leurs incommensurables capacités cérébrales pour établir les actions de chaque mortel selon les réactions prises à n’importe quel moment. Quand je les rencontrai en tête à tête, ils finissaient par jouer au Uno tout en fumant des offrandes.”

Dans un mouvement absolument inimitable, ses pouces se mirent à tourner l’un autour de l’autre. Lors de cette dernière phrase, ses sourcils inexistants se levèrent pour accompagner son amusement, avant de revenir sur la liste.

”Il me fallait éviter de changer d’apparence également : nous nous y autorisons seulement en changeant de cycle. Parfois, nous “mourons” et nous décidons de nous donner un nouveau visage car c’était ce qui pouvait être le plus plaisant. On harcèle un pays, on se fait défaire par des mortels, revivre pour leur ruiner à nouveau l’existence serait désespérant pour eux et redondant pour nous, quand bien même on est en plein milieu d’un cycle. L’autre exception est beaucoup plus simple : notre attention romantique se porte sur de pauvres humains, mais hélas ! Il ne sont pas intéressés par nos genres, par nos âges, par nos espèces… alors nous nous métamorphosons pour eux. Une réalité légèrement alternée pour immédiatement s’habituer à nos nouveaux nous et bim ! Le chemin de l’amour nous est ouvert !”

Il cligna des yeux.

”Bref, je m’égare ! Je voulais tout simplement dire que je désirais un peu de changement, un peu de tumulte dans ma vie. Et durant l’une des tournées redondantes et ennuyeuses que je faisais, j’entendis la douce musique d’une flûte qui était censée m’hypnotiser. Je jouais donc bien entendu le jeu, me laissant marcher sans accompagnement vers la forêt. J’y rencontrais cette lanceuse de sortilèges nommée Agathe. Elle ressemblait… Mmmh...”

Ses doigts remontèrent vers son illustre sourire, ses indexes tapotant contre les phalanges de la main adverse.

”Elle était vieille, quatre-vingt-quatre ans. Elle avait des pommettes sensationnelles, un air de dirigeant dans ses lèvres constamment concaves. Elle était fine comme un clou, ce qui lui avait évité de souffrir de trop de cellulite dans ses cuisses.”

Peut-être qu’Echo le voyait, mais les yeux du Baron le traversaient, à présent. Il voyait autre chose loin derrière lui. Une histoire avec une mortelle qui fut bénite par sa présence, peut-être ?

”L’éclair… dans ses yeux… Il y avait quelque chose d’incroyable dans cette vieille sorcière qui refusaient de simplement succomber au temps qui passait. Une réalisation dans son vieil âge. J’appris plus tard que ses filles avaient été faites concubines par le souverain de la région. Le genre d'événement tragique qui incite à la rébellion. J’avais vingt-et-un ans, elle en avait mon quadruple et je décidai de me faire… ‘corrompre’..."

Echo était de nouveau observé par les deux comètes vertes qui pourtant n’avaient pas changé de cible d’observation. Il souffla rapidement du nez, un miracle sensationnel du fait que son apparence n’en possédait aucun.

”Hah ! Au final, tu entendras l’histoire courte d’une de mes partenaires. Elle était incroyable au lit d’ailleurs. Puissante, incroyable et pourtant maternelle d’une façon très étrange. Certains vieillissaient comme du lait, mais elle, elle était un bon vin. J’avais de la chance : malgré son âge et la charge de plusieurs enfants porté autrefois, elle était parvenu à cultiver des plus gros seins que les miens..."

Avant de continuer, il posa une petite question en se dressant un peu vers l’avant :

”Je te l’avais dit que j’étais une femme à l’époque, pas vrai ?"

Il se reposa alors sur le dossier de sa chaise.

”Qu’importe, notre relation ne dura pas longtemps. Je l’ai connu vers la fin de sa vie, après tout. Elle s’était déjà créé un empire démoniaque et avait prévu de mener un assaut contre la forteresse impériale. Ses mains avaient trempé dans une piscine de sang innocent. Elle m’avait prise sous son aile tout simplement pour savoir si cela aurait été en vain ou non, et je lui ai dit que l’attaque serait perdue. Mais elle a décidé de le faire quand même. Je l’ai suivi, bien évidemment. Je voulais espérer avoir tort."

Il se releva alors de sa chaise, avant d’écarter ses bras comme pour étaler un ruban invisible.

”Des murailles sans fin à droite comme à gauche, des archers prêts à assombrir le ciel, des canons capable de déchirer n’importe quelle armure, un donjon qui se dressait dans l’horizon où séjournait notre cible."

Son bras gauche se fit ballant, mais celui de droite resta dressé vers le côté, comme pour arrêter des troupes invisibles.

”Derrière nous, des soldats corrompus, des créatures invoquées, des monstres répertoriés dans les grimoires ou inventés il y a quelques semaines à partir de détritus humains. Nous étions armés, nous aussi. Nos canons tiraient des boulets dont les hurlements pouvaient déchirer l’âme de nos adversaires."

Ses mains se rapprochèrent l’une de l’autre sans pourtant s’atteindre.

”Le calme, quelques minutes, quelques heures. Et soudainement..."

Ses mains claquèrent avec la fureur d’une météorite.

”Les artilleries se mitraillent, les projectiles s’entrechoquent, les têtes sont ouvertes par des flèches, des balles, des boulets. Certains parviennent à poser des échelles avant de se faire éclater des remparts. Nos tours d’assaut commencent à dangereusement s’approcher des murs...”

Il dressa le bras vers l’avant lentement, écartant l’autre jusqu’à ce que sa main droite ait le ciel pour cible et que son pouce gauche ait pour voisin l’espace où se trouverait normalement son oreille.

”Et c’est là qu’il apparaît, le Septième, L’Archidémon du Chariot, Bâton, Premier Victorieux, sur un cheval d'albâtre qui saute de la fente entre le mur et le pont levis, atterrissant dans un nuage de poussière et annihilant d’un coup de lance l’une de nos tours ! Sa monture se cabre et toute la vallée l’entend alors gueuler :”

Ses mains, transformées en poing, s’étendirent vers les cieux comme pour aggripper les pis d’une vache géante.

”MON NOM EST SET MONTECRISTO ABEL !! PAR LA VOLONTÉ DU PRINCE ET DE SA COURONNE ET POUR LE REPOS ETERNEL DE VOS VICTIMES, PÉRISSEZ DE MA LANCE VENGERESSE !!”

Il se tourna de nouveau vers son interlocuteur, une allure plus détendue après sa soudaine imitation de son frère aux cordes vocales incroyables.

”Set adore surjouer. Il est inévitablement le centre d’attention. S’il n’est pas le héros de l’histoire à la détermination sans relâche, il est son principal obstacle, ou bien une figure d’autorité et de contrôle qui le protège. Il aide, il venge, il combat, il triomphe, il contrôle. C’est incroyable de voir à quel point il se maîtrise tout en s’imprégnant de colère.”

Par son utilisation, la chaise est de nouveau bénie par le Baron.

”Bref, il décapite Agathe. Je prends son âme et la pose dans ma collection. Puis, naturellement, je décide de mener le reste de l’assaut. Il m’empale et ressort mes tripes, ma colonne et mon utérus d’un simple geste. Il me reconnaît enfin. On discute un peu alors que je “meurs” lentement et dans d’atroces souffrances. Il me dit que c’était un peu facile de gagner aujourd’hui. On se met d’accord pour que je revive d’ici quelques années pour mener une véritable guerre. Peut-être une apparence où j’ai les bras pour tenir mon épée, me dit-il. Ouais, d’accord, je lui réponds.”

Ses doigts finirent par se croiser à nouveau.

”Bref, on s’est battu plus tard, j’avais transformé mon petit corps d’oracle en guerrière démoniaque, épée contre lance, cling, cling, cling… La base. C’était pas ennuyeux, mais pas mémorable non plus.”

Il plongea son regard divin dans les misérables yeux d’Echo avant de rigoler un instant.

”... Oui, je sais, je dis que je vais parler de Set, et au final je parle plus de celle qui m’a conduit vers lui. Mais Set n’est pas forcément quelqu’un de très passionnant. Il joue pour gagner car gagner lui fait plaisir. Il veut conduire les gens qu’il aime à la victoire, il se laisse porter par ses émotions mais finit par être mature quand il le faut. Il n’est qu’une possible réaction à mon action, le héros qui se dresse contre le méchant. Je me demande bien ce qu’il fait, en ce moment...”

Il plaça ses mains derrière sa tête, rêvassant un instant à des pensées que nous ne saurions rivaliser avec notre réalité.

”Certains d’entre eux me manquent… On ne se croise pas tous les cycles… J’aimerais bien revoir certains d’entre eux, un jour… Comme Zanni ou Ankou...”

Sa tête se tourna à nouveau vers Echo.

”En tout cas, voilà l’histoire qui colle à ton numéro. As-tu apprécié ? Ne t'inquiète pas de ce qui se passe dehors, nous resterons sauf, ici.”
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MessageSujet: Re: Une légère attente   Une légère attente ClockMar 2 Fév 2021 - 0:30

UNE LÉGÈRE ATTENTE

— Sept, hein ? Il y en a des pires...

Oh, je ne vous le fais pas dire.

J’ai bien senti que la dégustation du lait à la menthe l’a laissé incrédule. Enfin, je dis ça mais son visage ne trahissait pas d’émotion particulière, juste ce genre de pause que l’on prend l’air de rien lorsque notre cerveau enregistre quelque chose qu’il ne connait pas pour le considérer acquis pour le restant de nos jours. Le corps a une mémoire formidable mais elle peut jouer contre nous, parfois. Du coup je me suis posé une question toute bête : qu’est-ce qu’un souvenir d’enfance, pour quelqu’un qui n’en a probablement pas eu ?

— Difficile d’avoir un souvenir d’enfance sans enfance. Mes apparences sont généralement aux alentours des quarante ans après tout.

Sa propension à devancer mes questions pouvait s’avérer frustrante, mais au fond je me doutais bien que si j’avais l’audace de penser qu’il en serait autrement, l’étrange réalité qu’il m’arrivait de traverser par intervalles irrégulières allait se faire un plaisir de s’imposer de toutes ses forces dans ma figure. Puis en moins de temps qu’il ne fallut pour le dire, les paumes de ses mains se rencontrèrent telles la collision entre un élément immuable et un autre inarrêtable. Ça m’a fait sursauter comme un brin d’herbe secoué par la tempête et mes oreilles se sont immédiatement tournées vers lui afin de lui montrer qu’il avait toute mon attention, pour de vrai cette fois. C’est-à-dire que mon ouïe est vraiment plus sensible que la moyenne, alors il ne me restait plus qu’à espérer qu’il se montre moins avare en termes décibels à l’avenir…

Je me suis donc assis plus confortablement, n’attendant plus qu’il pose sa plume imbibée de nouvelles d’une autre vie sur la page blanche de ma curiosité.

— Alors, voyons voyons voyons… Quelle histoire pourrais-je raconter ? J’imagine devoir éviter les anecdotes demandant trop de contexte, éviter l’ultraviolence… Je suppose qu’imaginer mes yeux sortir lentement de mes orbites face à la violence de mon frère n’est aussi intriguant que des dragons qui jouent au poker.

Ah, mais je ne voulais surtout pas qu’il se censure : au contraire, tout ce qu’il avait a me présenter était une potentielle source d’inspiration, une opportunité d’ouvrir mon esprit, d’emporter un peu du monde des autres dans le mien.

— Si je me rappelle bien, c’était il y a à peu près trois cent soixante-dix neuf ans…

Il devait avoir une sacrée mémoire, pour se souvenir de ce qui s’est produit plusieurs siècles en arrière !

— En fait, je n’ai aucune idée de quand ça s’est produit, je pense que j’étais avec des humains. J’en suis quasi sûr. Bref, je m’étais décidé d’éviter de me donner l’habituel corps adonisien qui m’offrait tant d’avantages dans les batailles et dans les discussions. J’étais devenu tout jeune, tout petit, un oracle infantile qui en savait trop. J’avais provoqué une grande vague de panique après avoir présagé une catastrophe après quelques miracles, l’apparition de démons ou de dragons… des monstres, quoi. Ils se manifestèrent, installèrent le chaos, se firent vaincre par un héros, l’habituel. Mais moi, au final, j’avais rien de mieux à faire que grandir.

Je l’ai écouté avec une grande concentration, en veillant à m’imprégner du prélude de son histoire. Déjà, des apparitions éphémères se dessinaient au-dessus de nos têtes, transformant la salle du trône en un ouvrage des temps anciens qui s’écrivait au gré de la fable contée par le Baron.  

— Évidemment, j’étais vu comme une bénédiction ou une malédiction en fonction des communautés. Dans tous les cas, j’étais déjà assez célèbre. J’avais cette tournée à faire dans la campagne pour prédire le résultat de telle ou telle récolte. Il faut planter ça ici, il faut planter ça par-là, ce genre de chose. Évidemment, ça commençait à stagner et donc à m’impatienter.

J’ai hoché de la tête, lui faisant part de ma compassion.

— Je n’avais pas le droit de me défaire “comme ça” de ma position, cependant. Enfin, “pas le droit”, c’était surtout des règles pour s’assurer de profiter de tout. Il ne fallait pas que j’abuse de mes pouvoirs, cela ruinerait l’amusement à long terme et à court terme je pouvais possiblement casser l’intérêt de mes frères et soeurs... car oui, au final on finit toujours par s’entrechoquer les uns contre les autres.

— Vous ne pouviez pas vous arranger entre vous ? je me suis enquis aussitôt.

— Oui, oui, on s’est mis des règles. Ne pas outrepasser ses limites, par exemple. On s’adapte au niveau de “puissance” de l’univers qui devient notre terrain de jeu. Par jeu, j’entends davantage ce que ta génération de mortels appelle “jeu de rôle”, mais sans scénariste principal. Cela n’a pas l’air très mature, quand tu y penses. Mais j’ai vu des dieux être imaginés jouant aux échecs, faisant travailler leurs incommensurables capacités cérébrales pour établir les actions de chaque mortel selon les réactions prises à n’importe quel moment. Quand je les rencontrai en tête à tête, ils finissaient par jouer au Uno tout en fumant des offrandes.

La comparaison m’a fait sourire comme un enfant, quand bien même je ne savais pas ce en quoi consistait ce jeu du "Uno" l’absurdité de la scène s’était déjà formée dans mon esprit et je n’ai pu m’empêcher de pouffer discrètement. Il y avait quelque chose de marrant à penser que des générations avant la mienne aient pu fonder les valeurs de leur société autour d’entités sorties tout droit de leur imagination pour justifier la domination de leurs pairs ou s’assurer de garder bonne conscience. Si ces mêmes entités existaient vraiment, que devait-elles en penser ? Etaient-elles aussi injustes que leurs écritures sacrées le décrivaient ? Pas tout à fait, selon lui. Il se pourrait même qu’elles aient été créées à l’effigie des mortels, et non pas l’inverse !

— Il me fallait éviter de changer d’apparence également : nous nous y autorisons seulement en changeant de cycle. Parfois, nous “mourons” et nous décidons de nous donner un nouveau visage car c’était ce qui pouvait être le plus plaisant. On harcèle un pays, on se fait défaire par des mortels, revivre pour leur ruiner à nouveau l’existence serait désespérant pour eux et redondant pour nous, quand bien même on est en plein milieu d’un cycle.

J’ai voulu en placer une afin de pointer quelques similitudes avec la prophétie que je lui avais récité plus tôt, mais il avait déjà repris de plus belle et je me suis retrouvé plus idiot encore que si j’avais ouvert la bouche.

— L’autre exception est beaucoup plus simple : notre attention romantique se porte sur de pauvres humains, mais hélas ! Ils ne sont pas intéressés par nos genres, par nos âges, par nos espèces… alors nous nous métamorphosons pour eux. Une réalité légèrement alternée pour immédiatement s’habituer à nos nouveaux nous et bim ! Le chemin de l’amour nous est ouvert !

C’était agréable de se dire que même les immortels pouvaient ressentir la douleur, l’ennui ou l’amour. Curieusement, cette pensée m’a aidé à relativiser et l’archidémon m’a paru moins inaccessible encore qu’il ne l’était trente minutes auparavant. Je pense que secrètement, j’aurais aimé qu’il me paraisse un peu plus humain, mais d’un autre côté notre première rencontre était vouée a être la dernière et il devait en penser la même chose : je me suis donc conforté dans la vision grandiose et subjuguée que j’avais de lui, sans chercher plus à me persuader que derrière ce regard impénétrable et ce sourire énigmatique, il y avait peut-être de l’empathie pour mon cas.

— Bref, je m’égare ! Je voulais tout simplement dire que je désirais un peu de changement, un peu de tumulte dans ma vie. Et durant l’une des tournées redondantes et ennuyeuses que je faisais, j’entendis la douce musique d’une flûte qui était censée m’hypnotiser. Je jouais donc bien entendu le jeu, me laissant marcher sans accompagnement vers la forêt. J’y rencontrais cette lanceuse de sortilèges nommée Agathe. Elle ressemblait… Mmmh...

Je me suis retrouvé sur la berge d’une rivière au beau milieu de l’après-midi, les deux pieds dans l’eau. Les alentours étaient un peu flous bien que très verdoyants, alors j’ai patienté afin d’en savoir un peu plus et de ne pas perdre le cours de mon imagination.

— Elle était vieille, quatre-vingt-quatre ans. Elle avait des pommettes sensationnelles, un air de dirigeant dans ses lèvres constamment concaves. Elle était fine comme un clou, ce qui lui avait évité de souffrir de trop de cellulite dans ses cuisses. L’éclair… dans ses yeux… Il y avait quelque chose d’incroyable dans cette vieille sorcière qui refusaient de simplement succomber au temps qui passait. Une réalisation dans son vieil âge.

L’enchanteresse prit peu à peu forme, et j’ai pu comprendre pourquoi elle lui était apparue si charmante en dépit de son âge avancé. A moins ce qu’à son époque on vivait déjà plus vieux ? Maintenant que j’y pense, je n’ai jamais connu de personnes plus âgées que trois fois mon âge… Mais des revues sociales et scientifiques m’avaient un jour appris qu’il était possible de vivre jusqu’à cent vingt ans. On arrête pas le progrès !

— J’appris plus tard que ses filles avaient été faites concubines par le souverain de la région. Le genre d'événement tragique qui incite à la rébellion. J’avais vingt-et-un ans, elle en avait mon quadruple et je décidai de me faire… "corrompre"...

Oh. Voulait-il dire…

— Hah ! Au final, tu entendras l’histoire courte d’une de mes partenaires. Elle était incroyable au lit d’ailleurs. Puissante, incroyable et pourtant maternelle d’une façon très étrange. Certains vieillissaient comme du lait, mais elle, elle était un bon vin. J’avais de la chance : malgré son âge et la charge de plusieurs enfants portée autrefois, elle était parvenue à cultiver des plus gros seins que les miens...

J’ai froncé les sourcils alors qu’il me traversait du regard comme la manifestation surnaturelle qu’il était censé représenter.

— Je te l’avais dit que j’étais une femme à l’époque, pas vrai ?

La surprise sur mon visage a eu l’air de le faire bien rire. Est-ce qu’il s’imaginait que ce genre d’affaire allait me choquer ? Je ne suis pas bien placé pour me prononcer sur ça, après tout.

— Qu’importe, notre relation ne dura pas longtemps. Je l’ai connu vers la fin de sa vie, après tout. Elle s’était déjà créé un empire démoniaque et avait prévu de mener un assaut contre la forteresse impériale. Ses mains avaient trempé dans une piscine de sang innocent. Elle m’avait prise sous son aile tout simplement pour savoir si cela aurait été en vain ou non, et je lui ai dit que l’attaque serait perdue. Mais elle a décidé de le faire quand même. Je l’ai suivi, bien évidemment. Je voulais espérer avoir tort.

Sa gestuelle est venue compléter les apparitions insaisissables qui peuplaient ma vision depuis plusieurs minutes déjà. Ce qui n’était jusqu’alors que des images est devenu un ensemble de sons, puis un bouquet de parfums, puis un festival de sensations à mesure que j’avais de plus en plus de mal à distinguer la frontière entre la forme et le fond de son récit.

— Des murailles sans fin à droite comme à gauche, des archers prêts à assombrir le ciel, des canons capables de déchirer n’importe quelle armure, un donjon qui se dressait dans l’horizon où séjournait notre cible. Derrière nous, des soldats corrompus, des créatures invoquées, des monstres répertoriés dans les grimoires ou inventés il y a quelques semaines à partir de détritus humains. Nous étions armés, nous aussi. Nos canons tiraient des boulets dont les hurlements pouvaient déchirer l’âme de nos adversaires.

A moins ce que ce soit juste moi qui soit beaucoup trop passionné par ce qu’il raconte au point de réaliser mon propre film avec ses anecdotes en guise de scénario et mon imaginaire débordant comme le meilleur des metteurs en scène.

— Le calme, quelques minutes, quelques heures. Et soudainement...

A ce moment-là, j’ai entendu une énorme détonation et des ombres sont apparues près de nous comme des bêtes féroces, les flammes coulaient du plafond comme de la lave en fusion et les cris d’angoisse n’en finissaient pas. Mon cœur a bien failli cesser de battre pendant une seconde et j’ai senti la panique s’emparer de mes mouvements, j’ai bien failli hésiter entre déguerpir dans mon atelier pour regagner un peu de lucidité ou bien demander au Baron de modérer la véhémence dans ses propos, mais ses yeux luisaient comme deux météorites sur le point de pulvériser la croûte terrestre et mon immersion dans son récit était beaucoup trop profonde pour que ça puisse cesser dans l’immédiat.

— Les artilleries se mitraillent, les projectiles s’entrechoquent, les têtes sont ouvertes par des flèches, des balles, des boulets. Certains parviennent à poser des échelles avant de se faire éclater des remparts. Nos tours d’assaut commencent à dangereusement s’approcher des murs...

Au cœur de tout ce chaos, le Baron écarta ses bras avec la noblesse d’un roi et la cruauté d’un démon, faisant apparaitre un élément de résolution quelque part dans le lointain. Quelque part entre les tours hissées vers le firmament et les murailles atterrées de toute leur grandeur, je l’ai soudainement vu cavaler tel un corps céleste passé un peu trop près de l’atmosphère.

— Et c’est là qu’il apparaît, le Septième, L’Archidémon du Chariot, Bâton, Premier Victorieux, sur un cheval d'albâtre qui saute de la fente entre le mur et le pont levis, atterrissant dans un nuage de poussière et annihilant d’un coup de lance l’une de nos tours ! Sa monture se cabre et toute la vallée l’entend alors gueuler :

Ses paroles se sont resserrées autour de moi comme un poing invisible, les limites de ma perception jusqu’à ce que je ne puisse plus voir, ni penser, ni sentir quoique ce soit d’autre que la formidable énergie que sa narration transmettait à mon être tout entier.

— “MON NOM EST SET MONTECRISTO ABEL !! PAR LA VOLONTÉ DU PRINCE ET DE SA COURONNE ET POUR LE REPOS ETERNEL DE VOS VICTIMES, PÉRISSEZ DE MA LANCE VENGERESSE !!”

Et puis tout a disparu avant même que je n’ai eu le temps de m’avouer vaincu. Le Baron et moi-même étions revenus dans le temps présent, accoudés sur nos assises respectives. Nos visages étaient calmes comme la surface d’un lac sur les coups de minuit. Mon cœur tambourinait fort dans ma poitrine, mais mon regard se taisait.

— Set adore surjouer, m’a-t-il alors confié. Il est inévitablement le centre d’attention. S’il n’est pas le héros de l’histoire à la détermination sans relâche, il est son principal obstacle, ou bien une figure d’autorité et de contrôle qui le protège. Il aide, il venge, il combat, il triomphe, il contrôle. C’est incroyable de voir à quel point il se maîtrise tout en s’imprégnant de colère.

Les tours s’étaient effondrées. Les soldats s’étaient repliés. Les démons s’étaient enterrés. Les drapés en velours qui encadraient les grandes fenêtres de la salle m’ont paru aussi épais qu’une gorgée de sang. Un frisson a remonté ma colonne vertébrale comme si la lance du Septième Archidémon lui-même venait de me transpercer.

— Bref, il décapite Agathe. Je prends son âme et la pose dans ma collection. Puis, naturellement, je décide de mener le reste de l’assaut. Il m’empale et ressort mes tripes, ma colonne et mon utérus d’un simple geste. Il me reconnaît enfin. On discute un peu alors que je “meurs” lentement et dans d’atroces souffrances. Il me dit que c’était un peu facile de gagner aujourd’hui. On se met d’accord pour que je revive d’ici quelques années pour mener une véritable guerre. “Peut-être une apparence où j’ai les bras pour tenir mon épée”, me dit-il. “Ouais, d’accord”, je lui réponds.

Ses doigts se sont entrelacés pour la énième fois.

— Bref, on s’est battu plus tard, j’avais transformé mon petit corps d’oracle en guerrière démoniaque, épée contre lance, cling, cling, cling… La base. C’était pas ennuyeux, mais pas mémorable non plus.

Puis il se mit à rire, plus sincèrement.

— ... Oui, je sais, je dis que je vais parler de Set, et au final je parle plus de celle qui m’a conduit vers lui. Mais Set n’est pas forcément quelqu’un de très passionnant. Il joue pour gagner car gagner lui fait plaisir. Il veut conduire les gens qu’il aime à la victoire, il se laisse porter par ses émotions mais finit par être mature quand il le faut. Il n’est qu’une possible réaction à mon action, le héros qui se dresse contre le méchant. Je me demande bien ce qu’il fait, en ce moment...

Ça devait l’avoir épuisé d’avoir pris de son précieux temps pour me raconter tout ça, parce que trois secondes plus tard la fatigue pouvait être lue sur son visage, le genre de soulagement que l’on ressent lorsque tout ce qu’on a sur le cœur est enfin évacué pour laisser de la place à d’autres choses plus actuelles ou plus intéressantes. Le Baron avait-il un cœur, pour commencer ? Forcément, sinon il n’aurait pas pu ressentir de l’amour ou de l’ennui. Mais qui est-ce que j’étais pour me permettre une telle déduction sans avoir peur de me tromper sur le coup ?  

— Certains d’entre eux me manquent… On ne se croise pas tous les cycles… J’aimerais bien revoir certains d’entre eux, un jour… Comme Zanni ou Ankou...

Dehors, j’ai senti la ruine du monde se détacher sur la perspective éventrée de l’horizon.

— En tout cas, voilà l’histoire qui colle à ton numéro. As-tu apprécié ?

— Oh, c’était très passionnant ! je lui ai répondu. Vos talents d’orateur m’ont vraiment transporté, je vous assure. C’est comme si votre frère était entré dans la pièce en même temps que vous avez annoncé le souvenir de votre rencontre.

On est resté un petit moment sans dire un mot et assez étrangement, je me suis senti dans une forme éblouissante et je me suis mis à sourire doucement. Peut-être que sa grâce m’avait touché en fin de compte, s’il en avait été de même avec son génie je m’en serais encore mieux porté mais je n’allais pas demander la lune non plus. Le privilège de sa compagnie était déjà bien trop pour le modeste que je suis.

— Il faut croire que tous les "Seth" aiment se faire le protagoniste de leur histoire, j’ai conclu. Celui que je connais n’est pas aussi extravagant que le vôtre… Mais son ambition reste aussi démesurée que son ego.

Jusqu’à ce que s’achève enfin son apparence éphémère et que, dans un dernier élan, tout son être succombe…

Je me suis relevé et j’ai jeté un œil au dehors. Toute cette agitation n’était pas très claire mais je savais reconnaitre une page qui se tournait au moment où j’en lisais une, et l’histoire qui était en train de s’écrire présageait une bien mauvaise conclusion.

— Ne t'inquiète pas de ce qui se passe dehors, nous resterons saufs, ici.

Je l’ai regardé. Il pleuvait des braises et de la cendre comme je n’en avais jamais vu.

— Vous êtes certain ? Je veux dire, y’a de quoi passer le temps dans mon atelier. Sauf si vos invités doivent se joindre à vous d’ici une minute ?

Cette information avait bien failli complètement me passer au-dessus de la tête : ce serait quand même dommage que je le détourne de ses obligations. Contrairement à moi, il semblait jouer un rôle de la plus grande importance, tandis que je m’étais contenté de débarquer durant l’entracte comme si je n’avais pas assisté à la première partie du spectacle. Ce qui était tout à fait le cas, dans les faits. J’avais décidément l’air bien malin, mais au point où j’en étais, je n’en avais pas grand-chose à faire.

Alors j’ai tourné la tête pour regarder ailleurs, l’air de rien.

— Vous allez passer la nuit ici… ? j’ai demandé.



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MessageSujet: Re: Une légère attente   Une légère attente ClockMar 2 Fév 2021 - 19:27
Le ventre contre les genoux contre le sol. Le front entre les doigts contre le sol. Les bras à l’horizontale contre le sol. Voilà où se trouvait mentalement ce pitoyable mortel à chaque fois que sa misérable bouche s’ouvrait pour goulument lécher les bottes du Baron. Ses sycophantes avaient toujours eu comme objectif d’utiliser leurs langues comme cireuses. Un être aussi drastiquement et impitoyablement supérieur que le Baron méritait d’être toujours entouré d’esprits faibles suivant ses moindres faits et gestes. Cependant, ce pittoresque Faraday utilisait de son libre arbitre pour offrir du cuir de semelles à ses papilles gustatives et en grande quantité. Quelle utilité que de décrire des faits connus de tous ? Le premier de tous les antagonistes était bien entendu un incroyable et sensationnel orateur ! Le plus impeccable et incroyable de tous les conteurs d’histoires ! Ce sac d’inspiration faible incapable de reconnaître ses propres talents ne pouvait en aucun cas comprendre le simple fait qu’une telle capacité soit, tout simplement. L’élément déclencheur était après tout la fondation de chaque narration ! Il était chanceux de ne pas être immédiatement châtié pour le culot dont il faisait preuve en assumant que le Baron puisse ne pas être conscient de ses propres aptitudes !

Les deux comètes de jade n’avaient pas d’iris pour permettre aux mortels de comprendre la direction observée par son auguste et imposante personne. C’était complètement idiot d’espérer parvenir à comprendre ce qu’il pensait, son splendide sourire reflétant les couleurs changeantes dans le ciel autour du chateau. Il parla d’un certain “Seth”, avec un “h” à la fin de son nom. Cela pouvait entièrement ruiner les familiarités avec Set, ce qui offrit au Baron l’occasion de montrer sa grande bienveillance : il décida d’entendre [sɛt] et non [sɛθ].

”J’aime penser que “démesuré”, signifiant “excessif”, peut-être pris dans les deux sens d’une mesure. Au lieu d’être un mégalomane ambitieux, ton Seth pourrait être une larve souffrant de stagnation et de haine de soi. Beaucoup plus commun qu’on ne le croit mais beaucoup moins intéressant dans le cadre d’une histoire. Je finis par n’en croiser que très peu...”

Quelle incroyable ouverture d’esprit offerte par le personnage le plus emblématique de cette planète à l’heure actuelle ! Une vérité présentée aux oreilles du mortel qui décidait d’être terrifié à l’idée de finir anéanti par les conflits entre des dieux éphémères et des combattants tout aussi oubliables. Il proposa au grand esprit de prendre place dans son atelier le temps de laisser le chaos se protéger, avant de faire un pas en arrière dans sa misérable prudence, demandant avec un intense mal à l’aise si sa Majesté comptait attendre des invités ou rester sur les lieux de l’immédiat cataclysme. Ce dernier se releva avec grandiosité et panache tandis que son visage se tournait dans la direction de l’armageddon avant de laisser son sourire s'abattre sur le mortel difficilement descriptible.

”Ceux que j’attendais ont d’autres plans. Mon emploi du temps de cet après-midi vient de se libérer.”

Son incroyable personne se releva de son siège avec lenteur et majesté, avant de descendre à une lente cadence les escaliers menant au trône, chacun de ses pas entraînant un son lourd résonnant dans le palais silencieux. Ses mains étaient placées dans les poches de son manteau, ses yeux dans ceux de Faraday.

”Je te pense intéressant, Echo. Sous tes bonnes manières et ta timidité sociale se trouve un catalogue de regrets et de connaissances non désirées. Je ne sais pas à quelle étendue, mais tu as un bagage émotionnel qui ne demande qu’à être ouvert à ton insu.”

Les deux étoiles vertes se rapprochaient de plus en plus de l’interlocuteur.

”Tu as parlé de ce Seth avec une certaine animosité. Ce n’était pas de la haine et je conçois donc que vous n’êtes pas ennemis, du moins pas à un niveau mortel. Je penserais à un patron mais de ce que j’ai cru comprendre, tu n’es pas vraiment employé par qui que ce soit. Tu as utilisé “je connais”, signifiant que tu gardes un certain contact avec lui que tu ne désires pas. Il pourrait être un client régulier mais non désiré ou bien...”

Il s’était rapproché davantage, tant et si bien qu’il s’était arrêté. En un mouvement de bras, il pouvait enrouler cette proie de son coude, posant sa paume sur son épaule.

”Ou bien - et c’est là que je vais probablement me tromper - Ou bien c’est une personne que tu as rencontré et avec lequel tu t’es un jour lié d’amitié. Tu es crédule et socialement naïf, tu l’as connu et apprécié jusqu’à comprendre que ce qu’il était n’était pas ton interprétation de sa personne. Tu as utilisé ‘ambition’. J’estime qu’il a encore des projets et que c’est peut-être ton intérêt pour ces derniers qui te fait utiliser le présent et peut-être garder un maigre contact avec lui.”

Avec un sourire enjoué et paternel, il observa les réactions faciales de sa cible tout en posant son menton entre son index et son pouce.

”Tu t’es pris d’affection pour ce Seth, ça n’a pas marché et cette animosité coïncide avec la prise de possession de ton atelier. Ce dernier, dans lequel tu proposes de nous laisser séjourner, doit être accessible depuis ici. J’en conclus que c’est un lieu à part accessible seulement avec ton accord et que tu préfères garder un statut d’hermite. La confiance placée dans un individu s’est trouvée tordue et tu séjournes, anxieux et solitaire dans un coin isolé à laisser ton imagination travailler et essayer d’oublier cette relation agaçante qui pourtant revient de temps à autre. Tu sembles être du genre à utiliser “je ne suis pas intéressant” comme remplacement plus humble à “je ne veux pas parler de moi-même” après tout.”

L’une de ses mains bougea dans sa poche tandis que l’autre se plaça, index dressé, devant le visage d’Echo.

”Hin-hin. Tu me diras à quel point j’ai tort une fois que nous serons dans ton atelier. Si je suis trop à côté de la plaque, tu auras droit à un cadeau.”

Il reposa sa main levé dans l’intérieur de son manteau.

”Tu devrais essayer d’avoir plus d’initiative, d’ailleurs. J’ai l’impression que tu laisses mes paroles résonner dans ta tête en y réfléchissant ardemment, mais tu ne sembles pas être dialogueur quand vient ton tour de parole. Fais attention à ne pas stagner. Je peux comprendre qu’il soit difficile de prendre la parole quand on est introverti, mais faire autre chose que commenter est généralement appréciable quand on est accompagné. Nous serons bientôt dans ton atelier, c’est l’occasion pour toi de présenter ton monde après avoir tant écouter le miens.”

Attendant l’ouverture du portail ou la téléportation qui les amènerait dans le monde du pitoyable mortel, il lança hasardeusement mais charismatiquement une dernière question.

”Es-tu proche de la violence ? Dans le sens où… Aurais-tu déjà vu quelqu’un être tué ? Peut-être étais-tu le tueur, d’ailleurs ? Je demande pour simplement essayer de déchiffrer le mystère de ta personne.”
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MessageSujet: Re: Une légère attente   Une légère attente ClockJeu 4 Fév 2021 - 14:50

UNE LÉGÈRE ATTENTE

— J’aime penser que “démesuré”, signifiant “excessif”, peut-être pris dans les deux sens d’une mesure. Au lieu d’être un mégalomane ambitieux, ton Seth pourrait être une larve souffrant de stagnation et de haine de soi. Beaucoup plus commun qu’on ne le croit mais beaucoup moins intéressant dans le cadre d’une histoire. Je finis par n’en croiser que très peu...

Sur le coup, je n’ai rien dit mais je n’en ai pas moins pensé. Heureusement que j’avais pris suffisamment de recul pour ne pas oublier que ce genre de remarque désagréable venait d’un être qui ne savait rien de ce que j’avais vécu, et ça tombait bien parce que l’inverse était aussi vrai. Mais j’avais la décence de ne pas me prononcer sur ce que je ne savais pas, moi au moins, ce qui me sauve de pas mal d’ennuis.

Pour autant, la fin du monde telle que je l’ai contemplée un jour était plus proche que jamais, le problème étant que ce n’était pas la fin de ce monde qui nous intéressait ici. Le Baron en avait-il seulement conscience, alors qu’il était en train de disserter sur la morale d’un protagoniste qu’il n’a jamais rencontré et ne pourra jamais rencontrer ?

— Ceux que j’attendais ont d’autres plans, a-t-il ajouté à la question que je lui avais posée plus tôt. Mon emploi du temps de cet après-midi vient de se libérer.

— Ah oui ? Ne tardons pas plus dans ce cas, je lui ai répondu en me dirigeant un pas après l’autre vers la porte de mon atelier.

Elle était restée entrouverte pendant tout ce temps comme si elle faisait partie du palais dans lequel nous nous trouvions, mais il ne fallait pas s’y méprendre, même moi il m’arrivait de me laisser surprendre au détour d’une matinée ou d’un après-midi. Heureusement pour moi, j’ai un sens de l’orientation si bon que je me débrouille toujours pour rentrer chez moi peu importe là où je me trouve.

— Je te pense intéressant, Echo. Sous tes bonnes manières et ta timidité sociale se trouve un catalogue de regrets et de connaissances non désirées. Je ne sais pas à quelle étendue, mais tu as un bagage émotionnel qui ne demande qu’à être ouvert à ton insu.

Je ne savais pas qu’est-ce qui lui faisait dire ça, mais j’ai pas osé lui dire tout de suite qu’il avait ni tout à fait tort ni tout à fait raison. Mais une fois de plus, je ne pouvais pas lui en vouloir : nous ne nous connaissions depuis même pas une heure. Il avait quand même une drôle de façon d’aborder les gens quand même, j’imagine qu’après avoir vécu des milliers d’années il ne prend même plus la peine de s’accommoder des bonnes manières.

— Tu as parlé de ce Seth avec une certaine animosité. Ce n’était pas de la haine et je conçois donc que vous n’êtes pas ennemis, du moins pas à un niveau mortel. Je penserais à un patron mais de ce que j’ai cru comprendre, tu n’es pas vraiment employé par qui que ce soit. Tu as utilisé “je connais”, signifiant que tu gardes un certain contact avec lui que tu ne désires pas. Il pourrait être un client régulier mais non désiré ou bien...

Je suis resté un moment figé sur place. La réunion de sa main et de mon épaule aurait pu me faire déranger si seulement je ne l’avais pas vu venir, mais la sensation restait curieuse bien qu’étrangère. Son contact était plus humain que je ne l’aurai imaginé au premier abord, simplement je ne comprenais pas quel genre de connotation il mettait à travers cette approche. Comme toujours, impossible de dire s’il me mettait dans la confidence ou s’il cherchait à se délecter des émotions qui contorsionnaient mon visage à chacune de ses révélations.

— Ou bien — et c’est là que je vais probablement me tromper — Ou bien c’est une personne que tu as rencontrée et avec lequel tu t’es un jour lié d’amitié. Tu es crédule et socialement naïf, tu l’as connu et apprécié jusqu’à comprendre que ce qu’il était n’était pas ton interprétation de sa personne. Tu as utilisé “ambition”. J’estime qu’il a encore des projets et que c’est peut-être ton intérêt pour ces derniers qui te fait utiliser le présent et peut-être garder un maigre contact avec lui.

Au pire, je me disais, la nuit finira par tomber et je serai enfin délivré de ses moqueries. J’ai commencé à envisager de prendre mon mal en patience, j’ai ralenti le pas tout en réfléchissant à ce qu’il me disait. Dans d’autres circonstances j’aurai très probablement changé d’avis, je me serai sûrement énervé d’ailleurs, mais j’étais déterminé à rester bien à ma place et à ne pas enclencher plus de changements que ce qui était prévu. Disons que ce serait pas trop mal d’exister quelques mois de plus avant de tirer ma révérence pour d’autres contrées lointaines.

— Tu t’es pris d’affection pour ce Seth, ça n’a pas marché et cette animosité coïncide avec la prise de possession de ton atelier. Ce dernier, dans lequel tu proposes de nous laisser séjourner, doit être accessible depuis ici. J’en conclus que c’est un lieu à part accessible seulement avec ton accord et que tu préfères garder un statut d’ermite. La confiance placée dans un individu s’est trouvée tordue et tu séjournes, anxieux et solitaire dans un coin isolé à laisser ton imagination travailler et essayer d’oublier cette relation agaçante qui pourtant revient de temps à autre. Tu sembles être du genre à utiliser “je ne suis pas intéressant” comme remplacement plus humble à “je ne veux pas parler de moi-même” après tout.

Quelle perspicacité. Mais tout ça, vous le saviez déjà, n'est-ce pas ?

Je ne pouvais m’empêcher d’avoir une admiration pour son incapacité à appliquer les conseils qu’il m’avait lui-même donné au début de notre rencontre. Il faisait beaucoup de suppositions et aucun constat, mais en même temps c’est difficile de se prononcer sur quelque chose dont on ne sait rien et qu’on ne voit pas. J’étais encore un peu indécis sur si je devais lui donner raison ou tort, ou si je devais continuer à garder mon silence histoire de ne pas me ridiculiser davantage.

— Hin-hin. Tu me diras à quel point j’ai tort une fois que nous serons dans ton atelier. Si je suis trop à côté de la plaque, tu auras droit à un cadeau.

Errare humanum est, perseverare diabolicum.

— Tu devrais essayer d’avoir plus d’initiative, d’ailleurs. J’ai l’impression que tu laisses mes paroles résonner dans ta tête en y réfléchissant ardemment, mais tu ne sembles pas être dialogueur quand vient ton tour de parole. Fais attention à ne pas stagner. Je peux comprendre qu’il soit difficile de prendre la parole quand on est introverti, mais faire autre chose que commenter est généralement appréciable quand on est accompagné. Nous serons bientôt dans ton atelier, c’est l’occasion pour toi de présenter ton monde après avoir tant écouté le mien.

Quand je me suis senti un peu moins tendu et un peu plus proche du pas de mon atelier, j’ai posé la main sur l’entrouverture de la porte en acajou. Sa main était toujours posée sur mon épaule. Ou peut-être qu’elle ne l’était plus.

— Désolé de vous décevoir, monsieur le Baron. Comme vous le dites vous-même, je ne suis qu’un humble observateur de la réalité parmi tant d’autres, j’ai pas grand-chose de pertinent à dire que vous ne sachiez pas déjà, surtout sur moi-même.

Je me suis retourné vers lui.

— Cependant, j’ai beau être un peu crédule je ne suis pas stupide, enfin pas au point de m’entêter à fréquenter quelqu’un si notre relation me fait du mal. Et je ne suis pas le genre à être intéressé dans ma relation avec les autres, c’est même plutôt l’inverse, si vous voulez mon avis.

Puis vers l’interieur de mon atelier. Dehors, ça commençait à se couvrir sévère comme le bulletin météo du jour d’avant l’avait présagé.

— Mais je vous en prie ! Faites comme chez vous ! je lui ai lancé, et ça a été mon tour de passer mon bras derrière son dos pour l’encourager à rentrer.

J’ai dû mettre la question de côté qu’il me posait le temps de m’assurer qu’il était bien passé de l’autre côté. C’était assez rare que je reçoive de la visite de personnes que je ne connaisse pas, mais encore plus rare que je ramène dans mon atelier non pas des bibelots mais des êtres doués de parole et de conscience qui viennent depuis l’autre côté.

Sur ce, nous sommes revenus là où tout avait commencé.


8:16


L’endroit où vous vous situez se trouve dans tous les temps et tous les espaces ; à la croisée de maintes histoires, univers et mondes, son ambiance tamisée et chaleureuse vous est aussi familière que si vous vous étiez rendus en son sein plus d’une centaine de fois.

— Ah mince, je me disais bien que j'avais oublié la radio en partant, changez de fréquence si la musique vous plait pas.

Sur plusieurs étages inaccessibles au public, ses murs sont couverts de meubles d’apothicaire, de cabinets de curiosités et de librairies de toutes les tailles et de toutes les époques, renfermant mille secrets qu’il faudrait plus d’une vie pour découvrir. Au plafond sont peintes à la main des milliers de petites étoiles ainsi qu’une horloge astronomique dont les aiguilles, faites d’argent, semblent bouger de temps à autres comme pour suivre le cours du temps. Des lampions de toutes les formes et de toutes les couleurs forment un ballet éphémère, bougeant au gré de leurs envies, à quelques centimètres au-dessus de votre tête.

— Je reçois rarement du monde, alors désolé si j’ai pas eu le temps de ranger.

Dans un recoin, un comptoir en bois sombre fait l’étalage d’une matinée chargée en caféine, en biscuits et en nouvelles venues d’ailleurs. Dans un autre, un assortiment de sofas au cuir pleine fleur légèrement fané par l'usure n’attendent que de vous offrir une assise confortable. Enfin, suspendues de tout leur long jusqu’à effleurer la boiserie du plancher, d’impressionnantes estampes sèchent leur absence de couleur dans la pénombre comme si elles étaient faites des inquiétudes et des mauvais rêves d’un esprit en manque de sommeil.

— Oh, ne faites pas trop attention à la Circonvolution Onirique sur votre gauche.

De temps à autres, il vous arrive d’apercevoir du coin de l’œil quelques petits détails, avant que ces derniers ne soient qu’une rémanence de votre perception. De par leur provenance, l’instabilité de leur réalité dans un paradigme qui n’est pas le leur a tendance à provoquer ce genre de phénomènes, heureusement sans conséquence sur votre intégrité mentale ou physique. Mais celui qui occupe les quatre murs de cet atelier n’a même pas l’air de s’en rendre compte…

— Hésitez pas à vous asseoir sur les sofas, hein, ils sont là pour ça. Je vais vous chercher quelque chose, si vous voulez bien !

En prenant place, vous remarquez que la table basse juste devant vous comporte quelques babioles de couleurs, de tailles, de formes et d’utilités variés. Certaines d’entre elles peuvent possiblement vous rappeler quelque chose, d’autres non. Et si vous en preniez une dans vos mains, pour faire passer le temps ?



"Mémoires d’un Observateur Quantique, Première Année" :
Ce journal de bord semble avoir été très récemment annoté.

L’Heure du Thé :
Les restes d’un goûter pris la veille, composé d’une tasse à moitié pleine et d’une assiette de financiers encore moelleux.

Aumône des Temps Anciens :
Cette bourse en cuir tannée est aussi douce au toucher que les pièces de monnaie à l’intérieur sont brutes.

Bloc Noir :
Un étrange objet cubique qui ne laissera pas passer la moindre lumière.

Eureka :
Vous l’avez trouvé ! Mais de quoi s’agissait-il, au fait ?



Je me suis penché par-dessus la séparation et j’ai rassemblé ce que je pouvais en l’espoir de satisfaire d’éventuelles attentes de sa part. Puis je suis revenu, un plateau chargés d’offrandes sur les bras, que j’ai déposé sans plus tarder sur le guéridon entre nos deux fauteuils.

— Quelque chose vous fait envie ?



Montagne Bleue :
Un café à l’arôme aussi puissant et intense que sa longueur en bouche est surprenante.

Le Jardin des Reines :
Une infusion nostalgique au parfum d’amandes caramélisées, de pomme et de cannelle.

Douceur d’Alicante :
Une confiserie à base de miel et d’amande, pour aller avec la décoction juste au-dessus.



Puis j’en ai profité pour reprendre son interrogation là où je l’avais laissée :

— Ah et du coup, pour répondre à votre question : je n’ai jamais vu quelqu’un tuer, ni tué quelqu’un moi-même. Je ne suis vraiment pas un amateur de violence, comme vous pouvez vous en douter…

Pouvons-nous considérer avoir tué une personne si nous n'avons rien fait pour l'empêcher de mourir ?

— J’ai quand même pas l’air d’avoir quelque chose à cacher, si… ? j’ai rajouté, un peu moqueur.

L’ambiance était un peu comme dans les films à suspense, quand on entend plus que les pensées des personnages se mettre en marche dans le plus grand des silences, avant le dénouement.



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Baron Mars Babel
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MessageSujet: Re: Une légère attente   Une légère attente ClockVen 5 Fév 2021 - 2:22
Je ne pouvais quoi que ce soit sur ce que pensait le Baron. Cependant, voyant la façon de ce mortel à appréhender les événements déroulés autour de lui, il était extrêmement facile pour d’autres insectes comme nous de voir à quel point il était solitaire. Une preuve étant son interprétation d’un “pouvoir” en “avoir”. Il fut en effet décrit que le Baron, il y a peu, “pouvait enrouler cette proie autour de son coude, posant sa main contre son épaule”. Ce n’était donc aucunement un geste qu’il fit. C’était compréhensible que de rêver de se faire cajoler par le suprême archidémon. Faibles et misérables mortels que nous étions, nous cherchions tous la bénédiction et la protection d’un être supérieur. Sa tentative imbécile de camoufler le vide dans son coeur se manifesta en une tentative d’épousseter le grand discours parfaitement perforateur qui décrivit à voix haute le mystère de son histoire. Il fit alors preuve d’une incroyable faiblesse en agrandissant son statut “d‘humble observateur”. Un statut ? Que dis-je ? C’est une pitoyable excuse ! Un prétexte pour ne rien faire ! Ô Baron, pourquoi donc t’intéresses-tu à ce sac de molles misères ? Nous ne pouvions répondre à cette question. Nous pouvions juste observer son sourire s’agrandir tandis qu’Echo qu’il n’était certainement, sûrement, complètement, catégoriquement et indubitablement plus du tout lié à une personne qui lui ferait du mal. Ce rictus ne pouvait être lié à une émotion particulière. Les machinations de son esprit restaient une énigme à laquelle la psyché humaine ne pouvait être comparée.  

”Heh !”

fut la gracieuse réponse qu’il offrit à Faraday quand ce dernier fit une pirouette vocale casse-cou pour éviter de révéler si tôt des éléments de son ennuyeuse histoire. Dans sa trentaine de dents on aurait cru voir des milliers des fanons, empilés les uns contre les autres, camouflés et entremêlés comme les ombres des arbres d’une forêt.

”Tout le monde dit “faites comme chez vous” jusqu’à ce qu’ils voient des bottes sales se placer sur la table… Allons, je taquine !”

Il fit un geste signature en entrant dans la pièce : une longue observation de droite à gauche de la pièce, offrant un silence apocalyptique tandis que son sourire illumina de mille feux la ténébreuse pièce dans laquelle il venait d’entrer. Impossible de savoir ce que ses yeux sans iris fixaient à un moment précis. Quelle chose se trouvait miraculeusement observée ? Les lampes trop proches du visage pour espérer ne pas s’entrechoquer avec les plus physiologiquement grands d’entre nous ? La hardbass insupportable sortant de la radio qui faisait vrombir les murs et bondir le transistor ? La collection matérialiste de babioles inutiles et de livres poussiéreux prétendant à la connaissance ? L’hôte qui s’empressait de s’excuser et de tenter de maintenir une fausse politesse recouvrant sa bien trop vraie crainte ? Quoi qu’il en soit, il fit une révérence bien assez tôt afin d’aller chercher quelque chose. Divin fut alors le geste entrepris par le Baron : il s’avança pour éteindre la radio. Son cou majestueux offrit à son visage un autre tour de bord, le seul signe pour nous autres mortels de véritablement nous assurer d’une direction générale prise par son regard. Sa vision inexplicable par la logique n’est au final que ressentie.

”J’adore voir un environnement raconter une histoire...”


Surprenament mais véridiquement, il s’approcha de la ribambelle de pochoirs prétentieux puant la pseudo-poésie. Étalant sa lumière sur le noir et blanc, il souffla du nez - Un geste absolument sensationnel du fait qu’il n’ait toujours aucune narine dans cette enveloppe corporelle ! Le renaclement s’accompagna d’un murmure.

”Ah, petite effrontée. Tu m’as dépassée...”

Je ne sais ce qu’il a pu voir dans ce gribouillis inconcevable, mais il sembla écarquiller légèrement ses yeux dans un grand élan de fierté. Je n’oserais dire qu’il était fasciné par le monde qui l’entourait, mais il devait accorder par pitié un semblant d’intérêt à ce lieu qui n’était pas accessible à n’importe quel mortel. Je suis personnellement sidéré qu’un abruti fini comme M. Faraday ait fini par gagner accès à sa propre dimension privée, un loisir que l’on devrait réserver à nos infiniment supérieurs et -

”Arrête d’insulter le gosse et continue de narrer, toi.”

Je - oui, Baron ! Il, euh, il me rappela à l’ordre tout en tenant un cahier, dont il n’y avait que deux pages de notées. Lisant à grande vitesse les quelques mots qui y figuraient, il attrapa un stylo et griffonna quelque chose aux alentours des premières pages où figurait le passé encore invisible de son hôte. Quelle excellente initiative ! Quelle bénédiction que de lui offrir un orthographe !... À moins que ça n’en soit pas un. Tout fut respectueusement reposé à sa place, entre une poche de nylon pleine d’argent et un cube suspect. Par sa réflection absolument supérieure et divine, l’archidémon attrappa le bloc noir comme l’encre, avant de le machouiller un instant pour finalement le reposer. Il finit par s’assoir sur le sofa où se trouvaient toutes ces choses. Les deux derniers objets étaient un tas de restes et une figurine représentant un personnage atypique, au chapeau de bouffon et aux vêtements de magicien. Il se prit une pichenette alors que le difficilement descriptible mortel revenait dans la salle tout en apportant de quoi abreuver sa majesté après que sa gorge se soit asséchée durant ses splendides discours.

”Jolie bobblehead. Et, jolie selection de même.”

Il étendit son bras pour agripper la tasse de café, paume contre la céramique, démontrant sa supériorité en vainquant la chaleur de ce chaud liquide. Le récipient fut apporté vers son sourire afin d’y offrir l’arôme. Une fois la gorgée déversée, son visage fit une métamorphose pour cloîtrer sa bouche et relever ses sourcils dans un air témoignant d’une calme surprise. Un “pas mal” visuel.

”J’aime bien.”

S’ensuivit la réponse à une question demandée un peu plus tôt. D’abord, une affirmation qu’il n’avait jamais tué personne ni vu quelqu’un être tué. Ensuite, une indication qu’il n’appréciait pas la violence. Enfin une question rhétorique quant au mystère qui l’entourait. Pressant son dos contre les coussins qui s’offraient à lui, une main entourant la tasse et l’autre s’appuyant loin de son épaule contre le dossier, le Baron reprit la parole.

”Je suis venu à la conclusion que ce que tu nies être caché l’est véritablement. Mais ça l’est aussi de toi. Peut-être que tu connais des bribes de ta propre histoire, mais non pas son entièreté. Tu caches des choses comme tout le monde le fait. Rien ne plaît plus à un amateur de vies mortelles que de découvrir toutes celles qui apparaissent près de moi. Tenter de deviner à l’avance les passés, les façons de réfléchir, les êtres de ces gens est une de mes activités favorites. Rien ne m’excite plus que la possibilité d’avoir tort. Ça me rappelle…”

La main libre susnommée retourna dans sa poche.

”Tu ne m’as pas vraiment dit si j’avais tort ou raison, tout à l’heure. Je vais assumer que je me suis complètement gouré… Tiens.”

Il posa sur la table un revolver avant de boire du café le temps qu’Echo puisse absorber la vision de cette étrange arme.

”C’est un Chekhov. Oui, le nom n’est pas très imaginatif, mais je l’aime bien. C’est un revolver qui t’appartient, maintenant. Il est destiné à tirer, un jour ou l’autre, et ce sera en rapport à ton histoire. Normalement, il devrait s’y trouver six balles. Évite de vérifier. Si une chambre se trouve vide, c’est qu’il a déjà été utilisé. Tu découvrirais peut-être des choses que tu ne souhaites pas savoir tout de suite.”

Il termina alors le café avant de poser avec respect la tasse sur la table. Il prit peine de remettre une pichenette à la figurine.

”Je ne suis pas venu dans un lieu comme celui-ci depuis un sacré moment. Je pense voir les traces du passage de quelqu’un que je connais, cependant. Peut-être que ce n’est qu’un effet de l’endroit. Peut-être que je confonds plusieurs cycles. Je ne sais pas. Mais quelque chose me dit que si ce sont bien tes rêves que je reconnais là-bas...”

commençait-il en pointant les gravures dans l’obscurité,

”...alors un fragment de mes frères ou soeurs t’es déjà apparu… Ou peut-être que je me trompe catégoriquement !”
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